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1 novembre 2022

Infernal Affairs (Mou gaan dou) (2002) de Andrew Lau & Alan Mak

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Exce-lllllent, exce-llllent, quel plaisir de revoir cette première mouture d'Infernal Affairs après l'adaptation inutile de Scorsese. Efficacité, direction d'acteurs au cordeau, musique d'ambiance électrique en ce début du nouveau millénaire, mouvements de caméra délicatement brusques ou brutalement ralentis, rebondissements à foison... Tout fonctionne dans ce premier tome d'Infernal Affairs avec un duo aux commandes, un duo de boss dans chacun des camps (le discret Anthony Wong chez les flics, le trublion Eric Tsang chez les mafieux), un duo d'infiltrés de grande classe (l'incontournable Tony Leung en taupe dans le milieu, l'implacable Andy Lau en espion chez les keufs), un duo de donzelles douces comme une Tsingtao glacée (la beauté fracassante Kelly Chen au chevet psychologique de Leung, la charmante Sammi Cheng en inspiratrice littéraire auprès de Lau), tout est jeu de miroir dans les vitres de ces grands bâtiments hong-kongais, de faux-semblants, de trahison, de double-jeu, de triple jeu, de quadruple "je"... Qui sera le plus malin, on sait dès le départ qu'il n'en restera qu'un, et on nage en eau trouble du début à la fin ; dès qu'un boss ou qu'un infiltré obtient un renseignement crucial, dès qu'il se croit plus fort que son adversaire... pam, il explose, chute bêtement d'un toit de quarante étages ou se prend une petite balle dans le front... Lau et Mak surfent sur un scénario totalement imprévisible et la vision de la chose est un vrai petit bonheur de suspense et de bouche bée - "Non, putain, pas lui !!!!".

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Dès le départ, avec cette intro à la Amicalement vôtre (le parcours en accéléré de nos deux infiltrés), on sent qu'on n'est pas là pour rigoler ni pour perdre son temps. Chaque plan est signifiant, chaque scène comporte son lot d'infos et on se frotte les mains à peine le titre annoncé. Bordel de Dieu, ils avaient la grâce, à cette époque, ces petits cinéastes du pays - Christopher Doyle en conseiller artistique à l'image, ça marque de toute façon des points. Une fois que l'on sait qui fait quoi, que l'on a bien identifié chacun des personnages principaux, on se demande comment il est possible de ne pas foirer une aussi belle idée... Comment ne pas dévoiler l'identité de l'un, de l'autre, tout en les rendant totalement opérationnel, tout en optimisant les confrontations... Une belle séquence avec une transaction de drogue qui foire, avec chacun de nos infiltrés qui jouent au plus fin : chacun joue totalement sur le fil du rasoir et ça fonctionne, cela retombe magiquement sur ses pieds - on est captivé par chacune des séquences, louant à chaque fois le sens du détail et l'intelligence de la mise en scène... Sur tous les plans, même les petits décrochages sentimentaux qui rendent compte au passage des fêlures de chacun de nos deux héros, les cinéastes parviennent à nous faire croire à la chose aussi abracadabrante qu'elle puisse paraître au départ. Jeu du chat et de la souris et des gros chats qui tombent sottement dans des pièges... Chacun de nos héros a sa petite crise de confiance, est imprévisible dans son cheminement moral (s'enfoncer dans le mal, revenir à la lumière...) mais là encore, aucun cadeau ne sera fait à l'un ou à l'autre : Mak et Lau ne dealent pas avec des questions de morale, de rédemption éventuelle, mais avec la fatalité : personne n'est à l'abri de sombrer, de mourir, il n'y a finalement ni Dieu, ni maître : la seule chose digne de respect est de rester en vie - c'est parfois une question de ruse, parfois simplement une question de chance, il suffit de croire en son karma... Les exécutions sont sommaires, la grammaire visuelle implacable (des plans larges pour montrer nos fourmis humaines face à leur choix, des plans serrés pour montrer leur faciès exprimant leur doute ou leur conviction, des gros plans pour montrer une bouche ou un front sanguinolents, quand il est trop tard pour parler ou pour réfléchir). Pas une once de gras, un train métallique qui avance à toute vitesse, un film implacable et terrible. Infernalement retors et jouissif.

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