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31 août 2022

Clean d'Olivier Assayas - 2004

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C'est beau l'amour, surtout quand on est cinéaste et qu'on peut se payer des déclarations d'amour un peu class. Assayas fabrique un film à sa Maggie Cheung dédié, et y met tous ses moyens. Ça donne ce beau portrait, passionné et mouvementé, où la belle est omniprésente, toujours prise en mouvement, dans la vitesse, embourbée qu'elle est dans sa volonté de renaissance et dans sa lutte pour survivre. Le contexte est éminemment assayassien : Emily est une droguée issue du milieu rock décadent des années 90. Complètement pétée du matin au soir, elle retrouve un soir son copain occis bel et bien par une overdose. Accusée de lui avoir fourni la drogue, elle perd la garde de son môme et se retrouve derrière les barreaux. A sa libération commence alors un long travail de résilience et de renaissance : Emily veut à tout prix récupérer son gosse, devenir une personne honnête, sortir de ce milieu délétère. De petits boulots en lutte contre les a priori du gosse, d'abnégation en minuscules succès, on assiste à la métamorphose du personnage, d'assez détestable qu'elle était au début en femme libre et libérée de la fin. Tout ça passe par des voyages à travers les pays (Etats-Unis, France, Angleterre...) et les milieux (les caves rock'n roll, les squats pourris, le milieu prolétaire parisien, les hôtels huppés, les aéroports anonymes...), prouvant encore une fois qu'Assayas est un grand voyageur (de genres et de territoires) et qu'il ne craint pas de confronter dans un même film les contextes les plus opposés.

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Nonobstant notre volonté inentamée d'épouser un jour Maggie Cheung, on est obligé d'admettre que pour le coup, malgré l'admiration totale que lui voue le cinéaste, malgré son omniprésence, elle n'est pas extraordinaire. Beaucoup plus convaincante en égérie cuir et rock au début du film, qu'elle traverse telle une comète en feu, qu'en femme forte se cherchant une légitimité, elle butte souvent sur la frontière de la langue, et semble presque absente parfois du film, comme si elle disait son texte (français en tout cas) de façon phonétique. On apprécie la façon de la filmer, tout en urgence, et on sent bien la passion d'Assayas pour sa muse ; mais il lui rendra plus justice dans Irma Vep, quand il la regardera réellement comme une image, comme une légende, qu'en lui confiant ce rôle trop psychologique, trop "français" pour elle. Par contre, Clean est remarquable dans les contextes qu'il arrive à recréer ; les ambiances rock du passé (avec ces apparitions prodigieuses de Metric, de Tricky, et cette BO absolument géniale), les atmosphères de motels minables ou de quartiers parisiens pourris, les ors des salons, les petits havres de paix (Béatrice Dalle en copine est parfaite), les belles scènes avec l'enfant, tout ça est magnifiquement travaillé, crédible et attachant. Face à Cheung, le cinéaste propose des acteurs très bien dirigés, à commencer par Nick Nolte, pour une fois assez génial en grand-père compréhensif devant faire face à la mort de son fils, à la maladie de sa femme, aux caprices de son petit-fils et à l'inflexibilité d'Emily : personnage très bien écrit et joué avec une modestie totale. Au bord du mélodrame, du film-rock, du dispositif, du film social, Assayas flirte avec le vide, y tombe parfois, mais se relève et la plupart du temps réussit un film émouvant, dynamique et fort. Pas mal du tout.

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Commentaires
S
"un grand voyageur (de genres et de territoires)" : hélas un peu à la façon du sucre dans le café, à la fois partout et nulle part. Chacun de ses films me rappelle pourquoi j'ai arrêté de lire les Inrocks il y a vingt ans. C'est toujours un peu peint avec le bout des poils. Mais bon ça se regarde et celui-là est pas le pire, loin de là. La scène d'aurore post-fix sur les quais par exemple est très belle, et oui Nolte est impec.
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