Rage de Dent (Dandan Dard) (1980) de Abbas Kiarostami

Vous êtes cinéphile mais vous avez une haleine de bouc ? Voilà le film tout trouvé pour à la fois se faire le court d'un maître (salement en retrait, certes) et apprendre à se brosser les dents. Fidèle à sa passion pour le gamins et les cours d'école, Abbas suit ici les traces du petit Mohammad-Reza, bon élève malgré son regard de jeune chiot battu, mais qui parfois, avant d'aller se coucher, zap le dentos... Du coup, on connaît la chanson, c'est d'abord l'haleine qui devient fourbe, puis la rage de dent qui vous donne une tête d'oeuf de Pâques puis les pleurs de douleur et de peur lorsqu'on arrive chez le dentiste et qu'on jette un oeil sur ses appareils qui feraient pâlir les bourreaux de l'Inquisition... Pendant que le docteur nous expliquera longuement les raisons de l'utilité d'un double brossage et la technique pour se brosser les chicots et déloger ces saloperies de bactéries (jamais vu une bactérie aussi laide en dessin-animé, brrrr), le petit Momo jouira sa mère sous les coups de boutoir d'un autre arracheur de dent - une longue plainte aussi tragique qu'une oeuvre de Racine. Bon... Si on perd un peu patience devant cette longuette leçon d'hygiène, on en tourne pas moins sept fois sa langue dans sa bouche pour passer en revue tous les éventuels petits interstices suspicieux de notre si belle dentition... Au delà de ça, pas grand-chose à se mettre sous la dent (ouhh bien ouej) si ce n'est un certain plaisir à observer cet air constamment contrit de ce petit acteur qui joue plus vrai que nature (on soupçonne le gars Abbas d'avoir filé au gamin des kilos de fraises Tagada avant le début du tournage : il exprime la douleur avec une certaine véracité et pleure toutes les larmes de son corps). Une oeuvre au fluor qui a la rage.