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Shangols
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29 décembre 2022

Decision to Leave (Heeojil gyeolsim) de Park Chan-wook - 2022

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Toujours la même impression (partagée par mon collègue, ce me semble) avec Park Chan-Wook : c'est brillant, spectaculaire, impressionnant, inventif, élégant et sophistiqué... mais c'est creux. Il y a franchement une idée par plan dans ce film, qui a d'ailleurs abusé le gentil jury de Vincent Lindon à Cannes qui lui a accordé le prix de la mise en scène, et on ne cesse de s'ébaubir au festival formel. Caméras placées en des endroits inattendus, variations d'échelles de plans virevoltantes, changement de point de vue à l'intérieur du même plan, montage impressionnant qui peut suspendre un geste pendant de longues secondes, ou précipiter tout en un seul bloc de temps, ou vous faire passer des années en une seule coupe... tout est d'une maîtrise totale, on connaît notre homme, et on sait sa passion pour nous en mettre plein les mirettes. Si donc vous allez voir le film comme le feu d'artifice du 14 juillet, vous ne serez pas déçu : c'est magnifique, photo, musique, montage, costumes, tout est parfait.

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Pour cette fois, le cinéaste délaisse un peu ses usantes histoires de violence pour écrire un mélodrame policier plus "sérieux" que d'habitude : une trame très sophistiquée, inspirée de toute évidence par le Vertigo de Hitch, qui voit un policier tomber raide dingue de la principale suspecte dans la mort de son mari. Dès qu'il la voit, il est convaincu de deux choses : sa culpabilité, et qu'il ne pourra plus jamais l'oublier. Park filme magnifiquement cette révélation coup de cœur, et aidé par son acteur assez subtil, enregistre avec beaucoup de talent l'emballement de la passion. On pense à Wong Kar-Wai dans ces minuscules jeux de séduction sans mots, dans cette façon subtile de faire se toucher des mains ou se frôler des corps, dans l’ambiguïté des sentiments ; dans ses meilleurs moments, Decision to Leave parvient à cet état de grâce. La dame, vénéneuse mais jamais vamp, troublante mais jamais salope, est un beau personnage tout en ambivalences, et quand il filme simplement l'amour en train de s'inventer, notre ami Park est talentueux. La deuxième rencontre de notre couple, par exemple, est un modèle de mise en scène, avec ce montage subtil et ces cadres clinquants et faussement simples qui déclinent toute une gamme de la passion tue. Il y a ainsi des sommets de sensibilités dans ce film, des plans qui peuvent vous émouvoir brusquement, sans prévenir, qui s'avèrent complètement juste et sensibles.

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Mais ils sont un peu perdus dans la masse de formalisme impressionnante, et qui fatigue à la longue. Le film dure 2h20, demande une attention constante, et c'est vrai qu'au bout d'un moment on décroche, non seulement devant ces plans tellement travaillés que ça en devient un pur objet, mais aussi devant cette trame trop complexe. D'autant qu'elle semble complexe alors qu'elle pourrait être très simple. C'est bien simple : vous décrochez deux minutes, des pans entiers d'informations risquent de vous passer à côté. J'avoue n'avoir pas cherché à comprendre tous les rouages de cette énigme policière à tiroirs, et m'être au bout d'un moment laissé aller à la pure contemplation, quand ce n’était pas à l'ennui. A force de chercher à nous égarer et de nous envoyer les éléments de l'intrigue façon staccato, Park se laisse aller au simple plaisir de la construction,et on décroche. Il y aura, comme chez Bouddha, une histoire de double et de trame qui se répète, d'amour impossible et de mise en scène de sa propre vie ; on peut comme chez lui trouver de quoi repaître sa soif de symbolique sophistiquée et voir là-dedans un film sur le cinéma lui-même. Mais Park raconte ça en densifiant exprès son récit, en s'évertuant de toutes ses forces à nous égarer dans une narration qui, au final, s'avère assez simple. Trop de crânerie, finalement, trop de savoir-faire et d'esbroufe, donnent un film pas inintéressant mais boursouflé. Park s'égare. (Gols 08/07/22)

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C'est vrai que l'ami Park, depuis ses débuts, est un très bon faiseur et il le prouve une nouvelle fois avec ce polar en effet très soigné ; s'il faut en effet quelque peu s'accrocher pour comprendre tous les ressorts de ce double meurtre (ou suicide ? ne spolions pas tout dès le départ...), on arrive progressivement à dénouer avec cet inspecteur finaud tous les noeuds de chaque histoire... Mais cette double enquête assez complexe n'est en vérité qu'un paravent par rapport à cette histoire d'amour (réciproque ?) qui se noue entre cet enquêteur et cette femme chinoise pour le moins chafouine, pour ne pas dire fourbe... Est-elle innocente (aux mains pleines ?), tue-t-elle en étant dans son droit ? Le moins qu'on puisse dire c'est que l'enquêteur est, lui, prêt à tout pour pardonner ses moindres débordements... Ne risque-t-il pas, lui, l'homme marié, le grand pro, de courir à sa perte pour les beaux yeux de cette femme terriblement manipulatrice ? Beaucoup de questions, me direz-vous, avant un dénouement pour le moins asez imprévisible... Je rejoins assez rapidement l'ami Gols quant à la complication à l'envi de l'intrigue pour une histoire ma foi fort banale : une sorte d'histoire d'amour impossible entre un homme déjà casé mais un peu las (il faut ken une fois par semaine, c'est la règle - fun...) et un électron libre féminin, mystérieux, intelligent, secret, dangereux - ou pas. Jusqu'au bout, on se demande lequel va finir par perdre l'autre, lequel est prêt à se sacrifier pour sauver l'autre et cette indécision apporte un peu de sel (marin) à la chose. Une intrigue chiadée, des personnages sur le fil du rasoir, des rebondissements troublants (la magnifique rencontre au marché où l'émotion de notre pauvre inspecteur et de notre Chinoise affleure) mais c'est vrai que ce sentiment d'avoir affaire à  une oeuvre qui cherche à tout prix à faire compliqué juste pour épater un peu la galerie laisse l'éternelle impression d'un cinéma parkien un peu trop boursouflé pour être totalement honnête et véritablement touchant. Un bon polar coréen, quoi, sans provoquer de liesse outre mesure. (Shang 29/12/22)

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Commentaires
R
Vu comme un feu d'artifice du 14 juillet. Le problème c'est vraiment la longueur, rogner une heure, ou le transformer en mini série de 4*40min et le bonheur serait bien supérieur.
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