Libertad (2022) de Clara Roquet

Et un nouveau récit d'adolescentes, encore un !!! Alors attention, là, oui, cela se déroule bien sûr le temps d'un été, ok, mais c'est en Espagne, déjà, au sein d'une famille qui bat de l'aile (le père et la mère de l'héroïne n'ont pas l'air d'être pressés de se retrouver, la grand-mère de la jeunne fille plonge, elle, inexorablement dans Alzeihmer...) et l'histoire se concentre entre deux jeunes filles, attention, c'est le petit angle original, de deux milieux sociaux pour le moins différents : la jeune héroïne, Nora, se lie avec la fille de la bonne à tout faire d'origine colombienne, Libertad... Nora, qui étouffe dans cette maison familiale, qui peine à trouver ses repères auprès d'une mère dernièrement moins au taquet et un père absent, trouve en Libertad un nouvelle compagnonne pour aller faire les 400 coups, en ville, le soir, en loucedé... La petite touche de maquillage, la fringue qui accroche le regard, les premiers petits copains plus âgés... Une histoire d'amitié à la vie à la mort pour ces deux adolescentes qui se cherchent (l'une sort de son petit cocon bourgeois quand l'autre sans véritable attache a déjà des projets d'émancipation totale) ? Vous avez déjà lu Bourdieu ?

Les cousins frenchy, la piscine d'un bleu azur, des adultes qui partent un peu en vrille,  la "mémoire" de la famille qui s'effrite, un nouvel été qui s'annonce pour Nora pas forcément comme tous les autres. D'abord parce qu'elle a poussé et ensuite parce que cette inconnue, cette petite gonzesse aux allures un brin dévergondées, cette Libertad au prénom si doux pourrait lui faire entrevoir d'autres plaisirs : la liberté, soudaine, c'est forcément tentant... et les garçons, aussi, même si Nora est encore d'une timidité évidente, normal à son âge, et qu'elle n'est pas du genre à sauter encore le pas... Roquet, dans une lumière solaire, construit pas à pas cette amitié entre deux jeunes filles que, socialement, tout oppose. Mais on est au XXIème siècle quand même ! Et alors ? Forcément, rapidement, la mère de Nora tente de mettre le hola (que tal) à cette complicité qui, à ses yeux, mettrait Nora sur une mauvaise pente... La mère de Libertad, consciente également de l'image de sa fille et de sa position subalterne, voudrait que celle-ci garde son rang et l'assiste dans son travail... Les petits rires adolescents laissent vite place aux désillusions et aux rêves brisés dans l'oeuf... sauf si, finalement, à la rentrée - ou pas. Roquet, sur un scénario finalement un peu convenu, nous fait entrevoir quelques instants d'insouciance adolescente de la plus belle eau avant de rapidement teinter son film de petites tensions - à l'image de ces parents qui se ne parlent plus, de cette grand-mère qui perd la boule : ce n'est pas parce que c'est l'été que l'insouciance semble ici pouvoir triompher. On revient vite sur terre et malgré cette fête programmée pour redorer le blason de la maison familiale, on a pas franchement l'impression que ces vacances risquent de finir en apothéose... Deux adolescentes qui goûtent aux joies de la liberté, un joli portrait d'une complicité naissante mais auquel Roquet semble rapidement donner peu d'espoir (à moins que... hum). On avait lu Bourdieu. Vivant dans un premier temps mais un scénario qui s'autodétruit dans un certain fatalisme un peu trop prévisible. Léger.