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12 décembre 2021

Madres paralelas (2021) de Pedro Almodovar

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On a un peu l'impression que notre avis sur les films d'Almodovar n'a guère évolué depuis ces trente dernières années. On retrouve toujours avec plaisir Penélope Cruz (qui n'a pas pris une ride) et Rossy de Palma (qui a pris un ou deux grammes), on suit ici avec un certain allant un récit qui tente ici d'entremêler histoire intime et Histoire de l'Espagne (ce qui n'est pas courant chez Almodovar, cette intrusion dans la politique), on apprécie siempre ces couleurs vives, ce montage soigné, ces cadres maîtrisés, cette petite musique point trop intrusive, tout comme cette volonté de jouer du mélo sans trop en faire... mais au final notre avis est toujours un peu le même : ouais, c'est bien, mais on n'a pas vibré non plus sa mère... Pourtant, au niveau du mélo, il y a de la place, que dis-je, il y a un parking dans lequel on pourrait aisément s'engouffrer : dès lors qu'il est question de viol, de mort de nourrisson, de parents aux abonnés absents, on peut considérer qu'il y aura matière à trauma et donc à larmes. On rajoute là-dessus une petite dose de franquisme, de jeunes gens engagés sacrifiés et enterrés improprement et on sent bien qu'on ne pourra être que sur une corde sensible... Mais plutôt que de jouer à fond cette carte du mélodrame pur et dur que le Pedro maîtrise, il décide (et c'est tout à son honneur, évidemment) de nous jouer une petite partition sur la loi du silence - à briser - (des années après la loi du désir... qui a dû s'émousser en route) qui possède certes une certaine finesse mais qui nous laisse aussi un peu trop spectateur... Entre Cruz as Janis et Milena Smit as Ana se noue une histoire intime sur tous les plans : un accouchement au même moment, des liens qui se tissent et se détendent, une tragédie qui les rapproche, un fait du hasard qui les lie à jamais, une relation sexuelle équivoque... Tout cela continue à perdurer uniquement parce que Janis parvient à un moment donné à briser cette loi du silence, à avouer la vérité : même si pour elle, ce fait est dramatique, est même potentiellement destructeur, mieux vaut que la vérité finisse par éclater que de vivre perpétuellement dans le mensonge, dans le non-dit... C'est grâce à cette parole qui se libère que cette confiance à/en l'avenir peut se nouer - au prix d'un effort surhumain, d'un sacrifice terrible, mais la sérénité a un coût...

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De même, forcément, cette période historique de l'Espagne qui est basée sur le déni, suite à une loi d'amnistie aux allures d'amnésie généralisée, est évoquée par l'intermédiaire de cette loi du silence : il est temps, un jour, de faire éclore la vérité, toute la vérité, pour que les générations futures puissent enfin dormir en paix (cette scène sur la fin où les exhumeurs de cadavres, semble-t-il, prennent la place des morts). Le parallèle, entre le destin de ses mères et la mère Patrie, est plutôt joliment amené même si on le voit venir de loin. L'histoire est ainsi relativement bien tricotée mais on attend forcément tout du long une scène qui nous cueille, qui nous fracasse, qui nous émeut : on aura bien droit à une "confrontation" amicale, intime, relativement éprouvante entre Janis et Ana (le temps est venu d’affronter la vérité : Ana par rapport à son passé et aux réactions (voire au passé) de son père et Janis par rapport à cette information, à cette bombe qu'elle détient et qu'elle n'ose lâcher de faire éclater sa propre vie), une scène où les yeux baignent tout du long dans les larmes et que le Pedro gère avec un tact honorable mais qui, je ne sais, peine à nous donner le change, à nous faire rentrer totalement dans cette histoire... Almodovar trouve dans la foulée des petites ficelles pour que chacun trouve son dû, sa petite part de bonheur (une œuvre résolument plus optimiste que la précédente si je ne m'abuse) et on pourrait s'en satisfaire avec un petit sourire de contentement - on finit tout du même un peu sur les rotules après cette démonstration qui vient un peu de loin et qui retombe, sur ses pieds acrobatiquement, miraculeusement. On reste encore une fois, pour ma part tout du moins, un peu sur la touche face à ces mélodrames qui se nouent et se dénouent de façon un peu trop artificielle. Le vieux lion n'est pas mort mais il semble qu'il faille se contenter dorénavant de la douceur de sa crinière (en acrylique).

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