Le dernier des Don Farel (The Pride of Palomar) (1922) de Frank Borzage
Voilà ce qu'il est bon d'appeler un véritable incunable : un Borzaiiigee qui nous avait échappé, comment est-ce tout simplement possible ? Souvent, il est vrai, on rêve de tomber sur la chose et lorsque le miracle se produit la déception est à la mesure de l'attente. Eh bien là, point ; l'image tout d'abord est quasiment parfaite tout au long des 1h35 de ce long-métrage et le scénar multiplie les rebondissements ; quant aux cadres du Frank (ces hommes seuls en fond d'écran, devant une croix ou au bout d'une allée), ils sont remarquables en tout point. L'histoire, elle, se concentre autour de ce dernier des Don Farrel, Mike (Forrest Stanley) : considéré comme mort (la nouvelle ayant elle-même achevé son veuf de père), il rentre dans le ranch familial pour découvrir d'une part qu'il est orphelin et d'autre part qu'il a un an pour payer la somme astronomique de 300 000 $ au type auquel le père a hypothéqué le ranch ; cet individu n'est autre que le père de la donzelle dont il a fait la connaissance dans le train : si le père semble un businessman pur et dur, la fille paraît beaucoup plus douce, montrant ostensiblement un début de crash pour Mike... Mike va devoir se battre tant et plus pour gagner sa croute et échapper à la déroute - voire à la mort : remettre la main sur un éleveur qui devait de l'argent à son pater, éviter les balles d'émissaires asiates qui lorgnent sur son terrain, sortir vainqueur de course de chevaux... Autant dire qu'il a du grain à moudre pour garder son dû et espérer peut-être, en prime, épouser cette bien avenante donzelle...
On a du drame (la mort foudroyante du père, l'effondrement de Mike quand il apprend la nouvelle...), de l'action avec de belles courses-poursuites en cheval, en voiture et des courses tout court de chevaux (même des scènes de rodéo, un peu vite expédiées, certes), du suspense avec ces fourbes nippons prêts à tout pour toucher le pactole, de l'amitié avec les proches de Mike toujours au petit soin pour cet enfant prodigue et même un soupçon de romance avec notre Mike sous le charme de Kay (Marjorie Daw) dont il n'a de cesse de se rapprocher - à moins que l'amie d'enfance de Mike finisse par emporter le morceau... On est content de voir que Borzage insuffle constamment du rythme à la chose, ne cessant de nous transporter dans des moyens de transport divers (train, cheval, voiture) et de nous livrer une histoire qui a fière allure ; certes on se doute un brin que Mike, au fond du trou, va progressivement remonter la pente (il fait preuve de pugnacité et peut compter sur la solidarité des amis de son père ou encore la dévotion amoureuse de la Kay (qui agit dans l'ombre)...) mais cette petite facilité scénaristique n'enlève rien au plaisir que l'on prend à le voir regagner du poil de la bête au détour de quelques scènes : quand la Kay lui fait son plus beau sourire, quand il retrouve son chien ou son cheval, quand il met la main sur un truand ou joue pour le fun au Mexicain (...), ou encore, jusqu'au bout, quand il la joue un peu bravache et crucifie l'ennemi. Un Borzage oublié ? Que nenni, le voilà bel et bien exhumé et il ne faudrait pas s'en priver !!!