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27 juillet 2021

LIVRE : Sueurs froides (Vertigo) de Charles Barr - 2012

9782355744778,0-6617470S'il est un film qui a donné lieu à 1500 livres, c'est bien Vertigo, chef-d’œuvre absolu, pervers, troublant, érotique, fétichiste, et tous les autres adjectifs de la chrétienté. Barr ajoute le sien à la liste, et le fait assez brillamment, reconnaissons-le. Précis jusqu'à la maniaquerie, pertinent et amoureux, il réalise un essai captivant sur le film, malgré son côté ramassé et quelques digressions pas passionnantes. Notons justement les défauts de la chose : une préface qui fait grimacer, avec une comparaison vraiment pas pertinente avec The Artist de Hazanavicius : sous prétexte qu'ils reprennent la musique de Vertigo, Barr en profite pour faire tout un laïus sur la viabilité de la musique, sur son actualité, etc. Plus écoutable est sa comparaison avec le récemment retrouvé (et commenté en ces pages) The White Shadow, qui a également pour thème le double. Parmi les petites scories du livre également, notons que les images en noir et blanc sont une aberration pour parler d'un film aussi splendide ; et ajoutons un petit soupçon de verbiage de la part de l'auteur, qui se regarde parfois écrire et qui use d'une langue très embrouillée (en étant conscient qu'il s'agit ici d'une traduction).

Ces défauts oubliés, notons aussi tout ce que le livre apporte, et qui compense largement : Barr a regardé le film avec une machiavélique précision, et toute la partie sur le découpage de la première heure du film est géniale. Chaque petit plan est scruté pour en déduire toute une symphonie des points de vue changeants, toute une grammaire hyper-pensée de Hitch sur la manipulation et la direction du regard, sur la place du spectateur dans cette "installation" très sophistiquée. Non seulement le regard est pertinent, mais Barr en déduit un faisceau de sens, de significations, des lectures possibles qui toutes paraissent viables, y compris celles auxquelles n'a certainement pas pensé Hitchcock. On le sait, les films de Bouddah en disent autant sur notre monde que sur l'inconscient du maître ; si on en croit ce livre, Vertigo est peut-être la pierre de touche de son œuvre en ce sens. Par son analyse de la (splendide) musique d'Herrmann, par son talent à suivre un détail tout au long du film (ici, le collier de Carlotta), par l'intelligence de ses analyses, le bouquin renverse ; et on aime particulièrement cette théorie selon laquelle tout le film serait une sorte de rêve de Scottie suspendu au-dessus du vide : cristallin ! La thématique du double est également filée avec pertinence, je n'avais jamais remarqué que le film se répondait à lui-même autour de la césure de la mort de Madeleine, non seulement dans le retour de la belle, mais même sémantiquement (la dernière image renvoyant à Scottie face au vide du début). Enfin, il dissèque avec beaucoup d'intelligence la complexité des sentiments humains dans les relations entre Scottie et Judy, ce qu'ils pensent être, ce qu'ils pensent que l'autre est, ce qu'ils sont réellement, ce qu'ils essayent de faire croire qu'ils sont. Une sophistication extrême que Barr affronte avec beaucoup de clarté, rendant justice aux scénaristes du film. Bref, un bouquin certes un brin engoncé dans son aspect universitaire, mais passionnant.

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Commentaires
A
J'ai revu Vertigo dimanche et il y a un truc que je n'arriverai jamais à comprendre : pourquoi lorsqu'ils vont à la mission espagnole on voit la voiture rouler parfois à droite, parfois à gauche ? Ça ne peut quand même pas n'être qu'une erreur de montage, ça aurait été facile à corriger. D'autant plus que ça se reproduit au deuxième voyage. Quelqu'un peut m'expliquer ?
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