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25 juin 2021

Les Sensuels (No down Payment) (1957) de Martin Ritt

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On continue de remonter la filmo de Ritt avec cette œuvre de couples entre eux. Ils sont jeunes, ils sont sortis de la guerre (avec des séquelles ? Ah, peut-être...), ils sont presque beaux, ils sont en Californie et vivent dans ce nouveau lotissement au nom si doux de, Sunrise Hills... Tout devrait finir par briller pour eux ? Eh bien pas forcément. Car si ces quatre couples semblent bien joyeux de se retrouver autour d'un barbec à boire des bières, il y a en chacun des fêlures qui ont tôt fait de remonter en surface au moindre petits coups de trop... Les nouveaux arrivants, les Martin (il est ingénieur, elle est femme au foyer) sont contents de découvrir cette petite bande du lotissement déjà, semble-t-il, assez soudée : les Flagg (il tente de vendre des bagnoles, elle est femme au foyer), les Boone (il tient une station service, se rêve en chef de la police, elle est femme au foyer - mais s'appelle Joanne Woodward, ce qui est un plus), et enfin les Kreitzer (il tient une grosse boutique, elle est femme au foyer). Vous allez me dire, comme ça, à brûle-pourpoint, cela fait beaucoup de femmes au foyer... Des desperate housewives des fifties ? Des femmes au bord de la crise de nerf qui ne rêvent que d'aller s'encanailler chez le voisin ? Vous vous emballez un peu, d'autant que l'essentiel des problèmes viendra des hommes... Le Flagg, tout d'abord, il a vite tendance à picoler et n'est pas très performant au taff ; il sert de beaux discours à sa femme mais cela reste des mots ; il peut de plus vite devenir très lourd, la nouvelle arrivante Martin en faisant d'entrée de jeu les frais (il a bu, il la presse d'un peu trop près en dansant...) ; le Troy, pour sa part, n'est guère mieux : suite à un passé qu'on devine tendu (personnellement : la guerre, les jaunes, il a un véritable musée de l'époque dans son garage, cela ne présage jamais rien de bon ; mais aussi sentimentalement : ils ont laissé leur premier enfant se faire adopter : était-ce parce qu'ils étaient trop jeunes ou parce qu'il n'était pas sûr, ce type un rien malsain et parano, de ne pas être le père ?) ; le Kreitzer, quant à lui, se débat avec des petits problèmes plus terre-à-terre : pas franchement croyant, il ne sait trop comment s'y prendre pour qu'un de ses employés d'origine asiatique puisse s'installer dans le quartier - ne serait-ce point, de sa part, un petit manque de courage face à ses "semblables" ? Bref, on le voit, il y a derrière ces nouveaux murs banlieusards et ces sourires de façade pas mal de petits problèmes qui couvent. Les Martin en feront-ils les frais ? Toujours est-il qu'à la fin, des huit, il en manquera un...

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Ritt pourrait se contenter de filmer ces petits couples vintage dans leur nouveau bonheur cousu main, ce rêve américain à portée de toutes les bourses (wasp). Que nenni, rapidement, on sent venir comme un petit malaise ; des couples qui ne roulent pas sur l'or, de la bibine qui coule à flot et des frustrations qui couvent. Nos nouveaux arrivants ont l'air bien tendre face à ce pochtron de Flagg qui voudrait hisser haut son drapeau mais se retrouve vite en berne, face à cet excité de Troy qui traite sa femme comme une enflure et qui se raconte des histoires sur son sex-appeal (surtout bourré), face à ce menhir de Kreitzer un peu pataud. Ritt tente le film choral tout en ayant un peu de mal à suivre à part égale ces huit individus. Il finit un peu facilement par se focaliser sur l'histoire la plus dramatique, choisissant de mettre au centre de l'attention en particulier deux couples - il traite du même coup sans doute un peu superficiellement les autres ; on pourrait également ajouter que du côté des femmes, on a un peu de mal (à part Woodward un peu plus affranchie) à différencier les caractères ; on sent bien que c'est surtout le côté obscur du mâle qui intéresse Ritt et il néglige un brin en passant une part de psychologie féminine. Qu'à cela ne tienne, le film a sa propre petite dynamique et l'on voit venir rapidement les nuages qui risquent d'assombrir ce soi-disant Sunrise estates... Il y aura forcément un drame, voire deux, mais Ritt fera le choix d'expédier les conséquences de la chose : très vite, les sourires de façade reprennent l'ascendant, dès lors que tout le monde se retrouve en public - il y a forcément (et ce même la famille asiatique semble dorénavant avoir été acceptée par la communauté blanche) un soupçon de causticité de la part de Ritt (je présume) dans tous ces beaux sourires ; une fois derrière les murs, chaque couple devra encore régler pas mal de petites tensions... Bien rythmé, excellemment interprété, un film sur les banlieues dortoirs ricaines des fifites qui garde toute sa vigueur et son esprit critique. Pas si sensuel mais pas sans sel.

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