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24 août 2021

LIVRE : Esther d'Olivier Bruneau - 2020

9782370552716,0-7277479Pas de doute : si vous cherchez un bon vieux roman de genre à lire sur la plage, Olivier Bruneau a ce qu'il vous faut. Déjà auteur d'un délicieux pastiche de roman d'horreur (Dirty Sexy Valley), il nous revient aujourd'hui avec ce livre vraiment prenant qui flirte avec la SF et l'érotisme, tout en donnant à manger au bon vieil adepte de "pulp". Que la littérature soit traitée dans Esther comme une option facultative n'enlève rien au plaisir, croyez bien que j'en suis le premier étonné : on est tout simplement pris par la main comme un enfant et emmené sans qu'on s'en rende compte dans la machination diabolique de cette trame très inventive ; tant pis si au niveau du style les occasions de faire la grimace sont nombreuses et que le roman, une fois la dernière page achevée et l'heure du bilan sonnée, ressemble plus à du Werber qu'à du Proust. L'important est le grand savoir-faire du gars pour vous plonger tête la première dans son histoire, et de ne vous en extirper qu'à la dernière ligne ; entre temps vous serez passé par de sérieux pics d'adrénaline, autant parce que la trame est haletante que parce qu'elle est chargée en sexe. Dès les deux premières pages, on voit bien que Bruneau est un as de la littérature érotique : sa description de l'acte réinvente en quelques lignes la façon d'écrire des scènes de cul, c'est franc, direct, fantasmatique, évocateur, sans fard, et on se frotte les mains (si ce n'est autre chose...) en attendant la suite, persuadé que, en ces fortes chaleurs, on a trouvé à qui parler.

La suite sera à la hauteur, mêlant ces séquences fortement sexuées à une trame policière et SF parfaitement menée : le triste destin d'Esther, robot hyper-sophistiqué dressé pour assouvir tous les fantasmes sexuels, trouvée par hasard un soir par un brave type en pleins doutes matrimoniaux, et qui va devenir la monnaie d'échange non seulement de la sexualité du bonhomme (et de toute sa famille...) mais aussi de manipulations autrement plus importantes. Il s'avère en effet que Esther a eu un passé peu commun, et qu'elle pourrait bien être le premier robot à s'émanciper du joug humain et à éprouver des sentiments ; ce que son créateur, une sorte de mélange entre Bill Gates et Frankenstein, cherche à étouffer, aidé par des androïdes meurtriers. Une trame de geek, on le voit, de fan de SF des années 50, d'amoureux de Cronenberg et d'Asimov, mais qui aurait également vu les films de John Waters et lu les livres de Bukowski. Mais malgré cette niche visée, le gars parvient à donner à son roman un aspect thriller anxiogène très prenant. Il sait parfaitement équilibrer son texte entre moments d'action (la poursuite en voiture à la fin du livre est parfaitement menée), pauses "philosophiques" (l'avenir, les dangers de la science quand elle se mêle à l'économie, les robots : avantages et inconvénients) et moments de pur style : ce sont les scènes de sexe, vraiment impeccables, ou les scènes où les personnages sont confrontées à leurs doubles robotisés, dans une belle réflexion sur l'altérité. On avale Esther d'une traite, ravi de retrouver ces personnages gentiment caricaturaux mais très attachants (une préférence pour l'adolescent qui découvre le sexe et la virtualité), pris dans l'engrenage d'une trame impeccable. Décidément, Bruneau est bien adroit dans la littérature de genre. (Gols 16/06/21)


Esther

Une œuvre en effet sans grande prétention littéraire mais qui vous amène docilement à éprouver de l'empathie pour ce robot rebelle. Esther, c'est son nom, est une robote toute pétée qui va devoir se reconstruire : reprendre forme, reprendre confiance, en l'être humain d'abord (elle est dressée pour le sexe, et vice versa hein, presque), mais surtout en elle-même, avant d'être de nouveau abusée et traquée... Ce robot, serviable mais un poil rancunier, entreprendra de se venger pour laver l'affront fait à tous ces êtres programmés pour servir, certes, et bafoués... On se situe en effet entre Asimov (l'âme des robots à l'ère de l'intelligence artificielle - qui n'a finalement guère avancé, mais qui a gagné en dignité tant l'âme humaine semble, elle, s'être dégradée...) et Frankenstein avec cet homme d'affaire démiurge qui a compris que le meilleur créneau pour la robotique reste encore le sexe - mais le sexe peut toujours vous péter à la gueule, même informatisé ; il y a ceux qui trouvent en ces êtres une âme sœur, ceux qui trouvent en eux le moyen de se reconstruire, de se ressouder (le couple central de l'histoire) et ceux qui ne peuvent s'empêcher de soumettre, de détruire tout ce qui leur semble plus faible qu'eux. Alors oui, le récit est assez haletant mêlant volontiers les genres (troubles adolescents, questionnement des désirs au sein du couple, thriller (avec ces deux agents tout droit sortis de Men in Black qui jouent les nettoyeurs) et même plongée judiciaire - un robot peut-il être jugé, doit-il être jugé ?). On flirte toujours avec Bruneau entre le petit côté racoleur (du cul, surtout métallisé - à croire que c'est la mode chez cette nouvelle génération d'auteurs) et un suspens prenant, avec ici tout de même un véritable souci de trame, de construction des personnages et un peu moins de "snuff littérature". Un petit bouquin qui se lit comme on sucerait un bonbon en silicone anisé : pas de gras, laissant juste sur les papilles une petite pointe titillante d'amertume. (Shang 24/08/21)

 

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