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27 mai 2021

Betty de Claude Chabrol - 1992

Betty

Morne plaine en cette année 92 pour Claude Chabrol, qui adapte ici un roman de Simenon et lui rend justice, puisque Betty est moyen (je n'aime pas Simenon). Très classiquement, sans surprise, il dresse son éternel portrait au vitriol de la bourgeoisie, à travers une histoire vénéneuse dont il a le secret, et qu'il ressort tous les deux films de son chapeau : Betty (Marie Trintignant) est une femme étrange, récupérée un soir complètement saoule par une aristo désœuvrée (Stéphane Audran), qui la prend sous son aile. Entre deux petits tours au bistrot versaillais "Le Trou", où s'agite une faune interlope, on suit à coups de flash-backs les étapes qui ont conduit la mystérieuse jeune femme, mariée à un bourgeois grand crin, puis abandonnée par sa famille, à la chute. Mais derrière ses airs innocents, la belle est-elle si blanche que ça ? N'est-elle pas responsable de sa déchéance ? Et surtout : n'est-elle pas, intrinsèquement, une perverse sadique qui aime à manipuler les gens ? Et notre Laure Le Vaucher, dans sa volonté de sauver ce petit oiseau tombé du nid, n'est-elle pas en train de sombrer corps et bien sous son emprise ? Mmmm ?

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Ambiances grisâtres, décors moches, musique terne (le curieux choix d'une chanson très sentimentale de Michel Jonasz, les instrumentations très beethoveniennes de Chabrol Jr), atmosphères délétères d'une bourgeoisie perverse et fade, on est bien chez Chabrol, qui n'aime rien tant que fusiller les nantis avec une amertume teintée de cynisme. Ici, ils en prennent pour leur garde, certes, à commencer par ce médecin obnubilé par "les vers qui grouillent sous la peau" et par ce défilé d'amants tous plus minables les uns que les autres dans le lit de Betty. Celle-ci traverse la vie avec une apparente passivité, mais son abrutissement (elle passe le film au lit, pratiquement), son opacité, sa petite figure mal réveillée cachent en fait de bien noirs desseins. Trintignant, avec sa fantaisie et sa façon de porter le malheur en bandoulière, est parfaite pour le rôle : j'ai toujours eu des doutes sur cette comédienne qui 'a l'air souvent de trop poser pour la caméra, mais ici son côté "too much" et borderline servent à merveille ce personnage complexe, méchant sans nécessité, manipulateur par ennui, foncièrement diabolique par amertume. Mais ma préférence ira une fois de plus à la grande Audran, qui joue parfaitement les mille nuances de sa grande bourgeoise : elle sait comme personne amener une part de faiblesse et d'angoisse à son personnage grand crin, et apporter de discrètes touches de tragédie sur son pâle visage d'aristo. Ce sont les personnages qui font toute la qualité du film ; car dans tous le reste, Chabrol est pris un peu en pleine paresse : la mise en scène est fonctionnelle, guère inventive ; l'écriture du scénario est curieusement balancée, mal équilibrée entre les flashbacks (très artificiels) et les retours au présent ; et le reste de la distribution est un peu bâclée, le défilé des tronches de notables habituel. L'ennui guette souvent, mais Chabrol nous récupère sans arrêt in extremis pour nous raconter cette histoire plaisamment perverse, à la fin inattendue, bon. Oubliable, mais plaisant.

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