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10 avril 2021

LIVRE : Le Silence (The Silence) de Don DeLillo - 2020

"(...) la situation actuelle nous apprend qu’il n’y a rien d’autre à dire à part ce qui nous traverse l’esprit et dont, de toute façon, aucun d’entre nous ne se souviendra.”

Le-SilenceOpuscule apocalyptique dondelillesque qui nous laisse définitivement à penser que l'on vit dans un temps propre aux anomalies : la preuve, il est encore question d'un vol d'avion (c'est la mode) qui, suite à quelques petites perturbations technologiques mettant à mort tous les écrans, va être à deux doigts de s'écraser. Nos deux héros, survivants, vont alors rejoindre un trio d'amis qui s'apprêtait à regarder l'incontournable superbowl, ce long spectacle annuel de pubs entrecoupé de pseudo-sport... Le bouquin se lit d'une traite avant de nous plonger dans un long silence pensif. Ce qui nous reste en tête, à la sortie de la chose, c'est cette impression de personnes désormais piégées par les écrans (celui des vols long-courriers, ou de la télé, ou des portables...), enfermées dans leur petit monde (la poétesse dans ses petits bouquins de notes, le néo-professeur dans ses théories einsteiniennes, la femme de Max dans ses fantasmes érotiques plus théoriques que pratiques...) qui face à cette situation de crise, plutôt que de faire preuve de solidarité, de s'écouter les uns les autres, vont avoir une certaine tendance à s'épancher en de longs monologues qui ne semblent plus s'adresser qu'à eux-mêmes... Le roman aurait presque tendance à devenir "théâtral" avec des personnages qui finissent par de longs apartés qui résonnent dans le vide. On l'aura compris, DeLillo, en signant cet ouvrage au postulat barjavelesque (Ravage, LA référence du livre de science-fiction et je ne dis point cela car l'homme finit sa vie à Moulins - Gols a une attaque et brûle les derniers ouvrages invendus de René), en prenant pour point de départ ce monde où la technologie déraille, laissant les êtres à l'abandon, comme démunis, ne fait point preuve d'un optimiste outrageant... On ricane un brin devant la causticité de cette scène où cet homme, privé de retransmission, devant son écran noir, se fait le match pour le lui-même, se l'invente, se fait les pubs, devient le propre miroir de ce spectacle télévisuel à la con qu'il connaît par cœur et dont il ne parvient point à se priver. Ces personnages d'intellectuels, au demeurant, ne parviennent guère à s'extraire de leur petit univers plein de réflexions fumeuses alors même qu'il est simplement question dorénavant de survie. On reste un peu bouche bée devant ce récit minimaliste qui semble mettre une sorte de point final à notre civilisation enfermée dans ses propres écrans "de représentation". DeLillo nous sèche. Radical. Silencio.

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