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26 mars 2021

Courts-métrages (1990-92) de Marlon Riggs

Affirmation (1990)

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Un homme face-caméra livre sa première expérience sexuelle libératrice et jouissive avec un homme. C'est dit sans fioritures, des petites douleurs initiales au plaisir anal indubitable. Une première nuit sans qu'il ne se passe rien et un réveil, mâtin ! Des cartons ponctuent cette histoire (Penetration is liberation, je trouve celui-ci pour ma part assez parlant), celle d'un homme s'éveillant au plaisir homosexuel et s'en souvenant avec une fraîche émotion. Riggs enquille en nous passe des images de défilés LGBT : des black gays chantent des slogans en particulier contre l'homophobie ; pris à partie par un type qui se trouve parmi les spectateurs ("il y a nos enfants, vous êtes des esclaves" - on pourrait reconnaître Christine Boutin derrière la moustache - ou grâce à la moustache, aussi, c'est vrai), cela renforce le chant de nos manifestants à découvert et fiers de leur appartenance à une communauté qui doit encore se battre au sein d'une autre : pas facile, en effet, dans cette communauté black de faire son coming out sans être encore la proie d'exclusion ou d'incompréhension. C'est ce combat que Riggs évoque avec toujours ce petit mélange se sensualité et de force. Ce qu'on nomme de la conviction, aussi.

Anthem (1991)

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Sous forme de clip suggestif à tous les niveaux (ces deux mâles qui s'entortillent ont un comportement pour le moins aisément lisible ; quant aux paroles, elles me semblent tout autant évocatrices (je ne pense pas quand il parle d'anneau que notre homme fasse allusion aux livres de Tolkien)), Riggs célèbre une nouvelle fois cet amour sexy et sexuel entre brothers black. Des percus qui assomment, un montage qui insiste (sur ces corps, sur ces manifs, sur ces danses, sur ces blacks qui s'assument), des paroles qui assènent ce besoin de libérer ses envies et d'afficher son combat. Un hymne à la joie d'être gay dans cette communauté qui peinait jusque-là de le faire à visage découvert. Riggs est loin, même en ce début des nineties (et trente ans plus tard, cela est loin d'avoir beaucoup évolué, d'ailleurs) d'enfoncer des portes ouvertes, mais il semble prêt à vouloir les défoncer à force de mots et de beat aux allures de coups de boutoir. 

"Non, je ne regrette rien", no regret (1992)

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C'est sur le SIDA que ce court d'une quarantaine de minutes cette fois-ci se penche. La bonne idée est d'abord de montrer le témoignage de ces cinq personnes de façon anonyme (un bout de regard ou un bout de moustache) avant d'agrandir cette zone d'ombre et de les montrer, littéralement, à visage découvert. Cette maladie n'est pas une honte, cette maladie est juste une maladie. Les témoignages reviennent sur la difficulté parfois d'annoncer la nouvelle à des proches, sur le besoin d'expérimenter d'autres formes de relations sexuelles (du plus extraverti au plus retenu dans l'adaptation à la situation...) et surtout sur le besoin de parler de cette maladie ; pendant longtemps, même mourir du SIDA n'osait s'avouer. Les hommes qui témoignent dans ce doc reviennent sur ce besoin d'appeler les choses par leur nom, pour ne plus avoir à mourir dans un coin, pour ne plus avoir à mourir en silence, mais aussi pour dire le besoin qu'il y avait dans leur cas à rencontrer des gens, autant pour se libérer de ce poids que pour "éduquer" des personnes qui pourraient être touchées à leur tour par ce putain de virus. Entrecoupés de chants et de poèmes (freedom raisonne encore in my head), ces témoignages cherchent à jouer franc jeu après des années d'ostracisation sournoise. Une parole libératrice, éducatrices et surtout des personnes droits dans leur botte qui n'ont pas à devoir baisser les yeux pour avoir chopé une saloperie. Mettre des mots sur des maux, sans honte ni regret. Ils en piaffaient d'impatience, Riggs leur rend parfaitement justice. 

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