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25 mars 2021

Une Histoire d'Osaka (Ôsaka monogatari) (1957) de Kôzaburô Yoshimura

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L'avarice version nippone, ça dit quoi ? Une sorte de folie qui rend encore plus fou, rien de neuf, pas même un sou. Et pourtant, et pourtant, ce père de famille partait de loin : menacé par les impôts, un paysan se retrouve viré de sa campagne avec femme et enfants (belle scène de nuit alors que la baraque prend feu et que tout le village s'agite) et décide de venir à Osaka. C'est d'abord brimade sur brimade : une vague relation qui l'envoie paître, des contre-maîtres qui refusent d'employer cet homme trop maigre... Misère, misère, jusqu'à ce que les deux gamins se mettent à ramasser le riz qui traine sur le port. Ce sera pendant une dizaine d'années leurs seules sources de revenu mais la fortune sera au rendez-vous : le père, vendeur de thé qui n'hésite pas à mêler des feuilles utilisées aux nouvelles (pas de petite économie, c'est son motto), ne tardera pas à se faire prêteur, louant chaque matin avec sa famille et ses employés les Dieux Balai et Brosse (séquence humour). Le seul petit problème c'est que le type a autant d'oursins dans sa poche qu'un plongeur auvergnat. Il rogne sur tout, tout, tout. Même quand il parvient à racheter l'immense baraque du samouraï qui l'avait méprisé à son arrivée à Osaka, il lui est impossible de changer de braquet : il ne cède pas plus aux siens (pas de jolies robes ni de jolie coiffure pour sa fille : c'est pas une prostituée), qu'aux gens du quartier (les donations, ça sert à rien) qu'aux gens importants (pas de business, pas de prêt). Il va jusqu'à pousser le bouchon le plus loin possible : sa femme tombe malade quand il se met en tête de marier sa fille au fils bêta d'une grippe-sou (on a de l'argent, dit-elle, à quoi cela sert si sa fille ne peut pas même être libre et heureuse ?) et il refuse tout bonnement d'investir dans d'éventuels médicaments. Elle meurt, la mère, forcément... et il ne change rien. Indécrottable, le vieux. Seul le fils commence à se rebeller un brin et décide enfin de piocher dans la caisse. L'heure de la lucidité viendra-t-elle un jour ?

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Yoshimura, après un début prometteur plutôt bien rythmé (cette prise de décision subite de quitter le village, cette capacité à vite passer à l'action à Osaka, sous l'impulsion des gamins, pour ne pas mourir de faim...), livre un film qui ronronne un peu autour de cet homme qui contrôle tout : ses dépenses, ses employés, sa famille. Il gère, met de côté et ne laisse personne remettre en cause sa façon de faire. Après une belle ellipse de dix ans (les voilà riches, parvenus !), le film s'enlise un peu autour de ce dictateur radin. On pense que le film va devenir un peu plus tendu quand sa femme s'offusque, s'oppose enfin à lui... mais la bougresse meurt. Le vieux, pas démonté pour un sou, continue les tractations pour marier sa fille (sans lâcher d'argent, of course) et il faudra attendre une petite sortie du fils dans les quartiers chauds (entraîné qu'il est par son potentiel futur beauf, un branle-manette patenté) pour que le scénario reprenne un peu de vie et de couleurs. Le petit jeune pille son père et assumera jusqu'au bout son choix : il punit son père, sauve sa sœur et se prépare à une vie de patachon... Le vieux qui déprimait quand il perdait un sou (la recherche de la pièce tombée dans la rivière : du pathétisme pur - le vieux n'a jamais peur du ridicule ou de la honte quand il s'agit de thune) trouve ses caisses vides et flirte avec la folie. Filmé en gros plan de façon édifiante (un regard hagard), on pense que le gars va soit changer enfin de mode de vie, soit perdre la raison. Mais l'avare, même quand il se rapproche de la mort, n'a qu'une crainte : qu'on le sépare de son argent quand il sera mort. Terrible portrait d'un nouveau riche grippe-sou, prêt à tout sacrifier dès lors que son pactole est concerné. Un monomaniaque bien dessiné par Yoshimura dans une œuvre qui n'évite malheureusement pas certaines petites longueurs et qui peine à trouver un second souffle. Yoshimura n'a pas la puissance psychologique d'un Ozu ou la truculence d'un Shimizu sur la longueur. Parfait malgré tout en complément de soirée écosso-auvergnate.

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Commentaires
S
On se bat avec Gols pour savoir qui va faire son odyssée... Hum... Allez, j'ai un film du type le plus chelou du cinéma français sur ma table de chevet... Faut juste trouver maintenant l'envie ...
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T
Et Tavernier, eh ! On y rend pas hommage en ces hostiles terres ?!!<br /> <br /> Tant de chefs-d’oeuvre immortels, pourtant. Du cinéma à hauteur d’homme qui ne négligeait ni le front ni la frome. Euh, ni le fond ni la forme. Tché.
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