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7 décembre 2020

L'Histoire officielle (La Historia oficial) (1985) de Luis Puenzo

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Le film de Puenzo (producteur par ailleurs quelques années plus tard d'Enfance clandestine) fait date puisqu'il est l'un des premiers à évoquer le mouvement des grands-mères de la place Mayo : ces femmes qui chaque jour venaient manifester pour tenter de savoir ce qu'il était advenu de leurs proches, de leurs enfants (souvent assassinés) comme de leurs petits enfants (disparus... morts ou confiés à d'autres familles ?). C'est justement ce sujet-là, celui des enfants disparus, que Puenzo traite ici en partant d'un point de vue assez malin : une bourgeoise, prof d'histoire, droite dans ses bottes, fière d'évoquer cette matière où la vérité d'hier permet d'éclairer les temps présents, commence à se poser des questions (il serait grand temps) sur la "provenance" de sa propre fille adoptée. Son mari, avocat, en liaison étroite avec la junte militaire au pouvoir (on est en 83, dans les derniers mois de la dictature), est celui qui a ramené la gamine à la maison et ne tolère guère que l'on vienne lui demander des comptes sur le sujet. Notre héroïne, Alicia, de plus en plus en hiatus dans son travail (les étudiants qui remettent en question ses cours) comme dans sa vie privée (elle se met elle-même à enquêter sur les origines de cette enfant, dans le dos de son mari), traverse une forte période de turbulence... Lorsqu'elle est directement en contact avec une grand-mère qui est persuadée qu'Alicia élève sa fille, son petit monde commence à s'écrouler...

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Film historique classique, à la facture un peu guindée, qui, à défaut de faire preuve d'un sens artistique qui crève les yeux, met en scène des acteurs pleins de conviction qui jouent sérieusement leur petit rôle. L'angle de vue du départ est assez bien trouvé puisque notre héroïne, solide dans sa vie professionnelle (elle aime à faire "la leçon", sans concession) comme dans sa vie perso (elle semble avoir traversé sans encombre cette période de crise du pays) va voir progressivement ses convictions se fissurer : ces étudiants qu'elle prend un peu de haut, sont loin d'être aussi aussi sots, tout comme ce prof de lettres relativement excentrique, tout comme ces gens qui manifestent quotidiennement bravant le pouvoir. Elle ouvre les yeux sur l'Histoire de son pays en même temps que sur son histoire intime et ça pique... Norma Aleandro (Alicia) incarne avec une certaine justesse ce personnage qui se fissure à vue d'œil : plus ses œillères tombent et plus la réalité l'effraie. Son petit discours institutionnel bien huilé se grippe et son mari, sous ces dehors de réussite, ne devrait pas tarder à lui apparaître comme un monstre, préoccupé qu'il est par ses seuls intérêts. Puenzo traite frontalement de cette période historique argentine particulièrement trouble évoquant cette couche privilégiée de la société qui a surfé, pendant cette période, sans trop se poser de question, sur le dos de la morale. Instructif, didactique, interprété avec conviction, un film à la base d'une nouvelle société, d'un nouveau départ, à défaut de révolutionner le cinéma.

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