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12 septembre 2020

LIVRE : Entre Fauves de Colin Niel - 2020

9782812620683,0-6766066Colin Niel nous avait offert un des thrillers les plus beaux du monde il y a quelques années, Seules les Bêtes, mélange d'acuité sociale, de précision dans les personnages et de suspense haletant. C'est d'autant plus décevant de le voir revenir cette année avec Entre Fauves, qui ne tient pas du tout ces belles promesses. Toujours pourtant ce goût du voyage, du mélange des antipodes et des destins sociaux dans ce nouveau roman. Encore une fois choral, le récit entremèle quatre points de vue que tout oppose : nous avons Martin, spécialiste de la faune, employé pour défendre les animaux dans un parc pyrénéen qu'il connaît comme sa poche, et obnubilé par la disparition du dernier ours du territoire ; nous avons Apolline, jeune archère fan de chasse et rêvant de décaniller un gigantesque lion lors d'un safari en Afrique organisé par papa ; nous avons Kondjima, berger namibien décidé à en découdre avec le même lion pour prouver sa valeur à son amoureuse ; et nous avons Charles, nom (un peu absurde) du lion, qui a droit lui aussi à son point de vue. Une photo d'Apolline trônant avec son cadavre de lion est publiée sur Facebook, colère de Martin qui lance une fatwa contre elle. La traque du gars contre la chasseuse se raconte en parallèle avec la fameuse chasse au lion en Namibie, qui cache peut-être des secrets et des coups de jarnac.

Sujet intéressant qui peut aborder de vastes thèmes comme l'écologie, la faune qui disparaît, la nature, les ambiguités de la noble occupation qu'est la chasse à l'arc, les parallèles entre traque à l'homme (pas bien) et traque à l'animal (pas bien, mais...). Et de temps en temps, surtout dans les 100 dernières pages, il est vrai que le livre arrive à s'écarter un peu de ses clichés et à mener de front un vrai suspense et une jolie poésie naturaliste, solennelle et ample. Dans ces chapitres-là, on se rend bien compte que Niel en a sous le capot, qu'il sait mener une trame et aussi s'intéresser aux personnages, tenir la tension et en même temps prendre le temps de la description de la nature. Mais le reste du temps, c'est-à-dire durant les 3/4 du livre, il se trouve complètement embarrassé dans une écriture trop sérieuse, qui déborde largement le sujet, et par le manque criant d'événements qui pourraient un peu surprendre le lecteur. Cette traque au lion, qu'il voudrait épique, pleine de rebondissements, a exprimé tout son potentiel dans les 100 premières pages, et il lui faut donc faire patienter son lecteur jusqu'au dénouement, 300 pages plus loin. Il multiplie de ce fait les fausses pistes, repoussant sans arrêt la confrontation entre les humains et le fauve, jouant au touriste dans les villages indigènes, tentant d'épaissir un peu des caractères peu attachants (le père), perdant son temps à tenter de nous décrire une nature sauvage dont il use très vite tous les adjectifs. Même côté Pyrénées, on est déçu par cette trop longue attente avant que les choses bougent un peu, et par ce Martin un peu bas du front, écolo sans épaisseur et trop extrême qui peut faire penser que l'auteur est clairement du côté des chasseurs. Totalement dénué de mise à distance ou d'humour, Entre Fauves nous balance les grandes orgues là où elles ne sont pas nécessaires. Et comme les personnages sont clicheteux et monocordes, on s'ennuie sévère face à cette prose très sûre d'elle (ça m'a rappelé le funeste Franck Bouysse, c'est dire), alors qu'elle se rapproche plutôt d'un roman pour ados rêvant d'aventures exotiques faciles. Espoirs déçus...

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