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26 août 2020

LIVRE : La Fièvre de Sébastien Spitzer - 2020

9782226441638,0-6736846Pas facile de vivre au quotidien en 1878 à Memphis, surtout frappé de la fièvre jaune. Spitzer sort son manuel de sociologie et nous raconte l'épidémie qui s'est abattu sur la région en cette sombre période, à travers une poignée de personnages : il y a là une tenancière de bordel qui va se transformer en wonderwoman du soin hospitalier, un propriétaire de journal suprémaciste qui va passer de père-la-morale à sauveur de la veuve, une fillette black qui va subir mille avanies et frôler la mort, un docteur un peu charlatan, une pute au grand coeur, un milicien bas-du-front, etc. Des premières alarmes aux levées de la menace, on suit le parcours de ces héros ordinaires, de ces gens normaux confrontés à un mal qui frappe à l'aveugle. Bien documenté, le livre prend son temps pour décrire l'horreur que constituât cette fièvre, les ravages qu'elle fit dans la société (à commencer curieusement par les blancs, ironie en cette période de post-guerre civile aux cendres encore chaudes), et les différents comportements humains qu'on a pu prendre face à icelle, de la fuite à la panique, de l'héroïsme à la passivité, en passant par ces pillards et ces psychopathes qui ont su tirer profit du malheur. Il est bien sûr tout à fait loisible (bien que l'auteur expliquât qu'il a écrit ce roman avant) de faire le pont avec la pandémie actuelle, et on peut dire que La Fièvre sort à point pour nous renvoyer l'image d'un peuple soudé seulement en surface, prêt à toutes les vilenies dès que le mal frappe. Le livre est en tout cas agréable, retrouvant quelque chose du romanesque de Steinbeck, par exemple, un sens de la narration et du récit qui marque des points. Les personnages sont forts, et Spitzer excelle à transformer les salopards en héros, opposant à leurs idées toutes faites une catastrophe qui remet les pendules à l'heure. Celui qui traitait le sexe en anathème se retrouve amoureux d''une prostituée, celle qui se flatte d'être proche de Dieu laisse mourir ses semblables dans d'horribles conditions, celui qui pendait les noirs en place publique découvre l'humanité d'une petite black, celui qu'on croyait escroc s'avère trouver le remède contre la fièvre... Humain et empathique, le livre se lit tout seul. Malheureusement, le style n'est pas à la hauteur : Spitzer écrit un peu plat, un peu fonctionnel, et son livre manque du souffle que sait trouver par exemple un Pierre Lemaitre. Intéressé, mais pas passionné donc par cette histoire, parce qu'il y manque un vrai projet littéraire, un regard, une façon de voir.

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