Une Etrange Affaire de Pierre Granier-Deferre - 1981
Ah merde, un Granier-Deferre... Eh oui, on fait exactement ce qu'on veut sur ce blog, passant sans façon d'un film guatématltèque à un navet français, parce que c'est ça la vie, des joies et des peines, et elles sont belles les couleurs de la différence. Un oeil donc sur ce fleuron du cinéma kaki des années Mitterand. Mais juste un, parce que l'autre est en train de tourner. Lanvin est un petit employé d'une entreprise ; Piccoli en est le nouveau patron. Le deuxième va "subtilement" prendre l'autorité totale sur le premier, et devenir le sujet central de son existence, aux dépends de Nathalie Baye (rarement aussi mauvaise) en épouse délaissée. Vous noterez les guillemets ajoutés à "subtilement" parce que Granier-Deferre y va au caterpillar dans sa description de l'aliénation du travail, de la lutte des classes, et sa défense du prolétariat s'apparente à une attaque au char d'assaut. Le cinéma a bien évolué depuis les funestes années 80, c'est pas dommage. A l'époque, on ne s'embarassait pas trop de crédibilité, et les pires excès passaient pour vérité vraie, si on en croit cette satire épaisse comme un vieux Saint-Nectaire. Du coup, on ne croit pas un instant aux mésaventures de ce pauvre Louis Coline, qui subit une fascination incontrôlable envers son patron, au point de travailler week-ends et jours fériés, de préparer les repas et d'aller jusqu'à passer la nuit avec lui. Certes, Piccoli, toujours impérial malgré l'adversité, est doté d'une autorité totale, et joue un boss sûr de lui, diabolique et séduisant ; mais on se dit qu'aujourd'hui, à la première tentative de harcèlement moral, il aurait eu la CGT et tout le staff sur le dos, surtout en usant de ficelles aussi épaisses. Lanvin, lui subit et subit encore, délaisse son couple, passe tout son temps au taff, sous le regard perçant de Piccoli qui semble jubiler. La seule bonne idée de la chose, c'est de lui avoir adjoint deux sbires aussi cyniques que légers, joués par les inévitables Jean-Pierre Kalfon et Jean-François Balmer, sortes de diablotins dandys parfaitement odieux, qui ont compris qu'ils jouaient dans une comédie et en font des tonnes avec efficacité. Sinon, qu'est-ce que vous voulez, c'est du Granier-Deferre : appuyé, schématique, reposant sur une seule (mauvaise) idée, pas dirigés (les acteurs sont en roue libre : les bons s'en sortent, les mauvais sont pires), sans regard, sans mise en scène, triste comme un jour sans pain et photographié au minimum syndical. Une daube, quoi, ni plus ni moins, aussi inoffensif qu'une biche aujourd'hui et aussi passionnant qu'un vieux téléfilm de FR3.