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3 juin 2020

Eclipse (Kinkanshoku) (1934) de Hiroshi Shimizu

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Vrai plaisir de se repencher sur la filmo de Shimizu, vrai peintre nippon des sentiments et des déceptions amoureuses. Il est des meilleurs amis dont on se passerait bien... C'est un peu le leitmotiv de ce film muet où l'on va voir un certain Osaki devoir toujours subir la présence de son meilleur ami Kanda ; les deux hommes sont proches, très proches et c'est surement ce qui pouvait arriver de pire à Osaki. Quand son pote Kanda revient de Tokyo tout auréolé de ses diplômes de droit, il se met en quête d'une jeune femme. Son regard tombe sur la jeune Kinue, amie d'enfance et cousine d'Osaki. Celui-ci donne rendez-vous à la jeune femme toute émoustillée - elle l'aime depuis des années... Seulement quand il lui apprend que c'est son ami qui a des vues sur elles, boum, badaboum... Premières petites tension. Osaki, tout morfondu par la déclaration d'amour de Kinue, décide de se barrer à Tokyo ; et elle fera de même dans la foulée... Fondu. On retrouve notre gars Osaki qui est victime d'un accident (il se fait écraser par une bagnole – pas de bol, décidément) : il se fait tout de même héberger par une famille friquée à l’origine de l’accident... Alité puis catapulté précepteur du plus jeune gamin, il voit la bonne Kayo puis la fille de la maison, Tomone, lui déclaraient leurs sentiments. Bingo ! Mais pensez-vous... Qui se pointe dans la foulée pour demander en mariage Tomone (il lui donnait des cours particuliers quand il était étudiant) ? Kanda ! Osaki, une nouvelle fois, décide d'en prendre son parti ; il bosse avec le frère de Kayo, se rapproche d'elle (non, Kanda ne s'interpose point cette fois-ci) mais qui finit cette fois-ci par débouler dans sa vie ? Kinue ! Vont-ils enfin pouvoir consommer leur amour ? Que nenni, Kinue, voyant tout l'amour que Kayo porte à Osaki, décide de s'éclipser à son tour... Mais attention les amis, les rebondissements sont loin d'être terminés...

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Je ne m'attendais pas à voir un petit Shimizu muet de derrière les fagots avec une intrigue aussi complexe que dans un film de Kaufman / Jonze... Décidément... Le plus fort, sans doute, dans tout cela, c'est de voir la résilience du gars Osaki qui, à chaque fois, respecte les choix de son pote et préfère se faire oublier plutôt que de faire, aux femmes qui l’aiment, de grands serments d'amour. Un type qui s'efface, sans doute un peu trop, un peu trop facilement aussi, comme s'il ne pouvait assumer pleinement les sentiments qu'il inspire. Les femmes, elles, ne sont guère plus à la fête... Kinue et Kayo se retrouvent forcées de jouer les filles de bar pour survivre, rêvant qu'un Osaki les prenne enfin sous son aile. Lui, le bon gars, mettra du temps à agir, à assumer, à réagir - il le fera d'ailleurs de façon quelque peu maladroite et sans l'intervention (pour une fois salvatrice) de son ancien pote Kanda, son histoire aurait pu très mal tourner. Heureusement, les dieux de la romance à la nippone se montreront enfin bienveillants.

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L'histoire nous emmène de la campagne (paisible... mais que nos trois personnages finiront par fuir) à la ville (lieu de toutes les libertés), un endroit certes plus trépidant, mais où nos héros (et notre héroïne Kinue, forcée de jouer les hôtesses) tarderont tout autant à trouver leur voie. Il y a également dans ce film une certaine opposition entre les femmes plus traditionnelles, (pour ne pas dire "dociles") (Kayo) et celles plus modernes, émancipées, riches, égoïstes (Tomone) - Kinue, elle, passera d'une catégorie à l'autre sans que cela lui soit particulièrement bénéfique, au moins dans un premier temps. Résilience, patience, chagrins consommés dans la solitude, il y a une petite musique sentimentale un peu triste dans cette œuvre de Shimizu, et ce même si le ton reste au détour de plusieurs scènes relativement enjoué (les retrouvailles au pays entre les deux potes, les petites sorties très animées entre Tomone et Osaki…). Une œuvre très réussie, pleine de rebondissement, de surprise, de rythme parfaitement troussée par un Shimizu qui prend indéniablement plaisir à faire durer les possibilités du muet. Brillant.

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