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Shangols
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19 mai 2020

La Guerre est finie d'Alain Resnais - 1966

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On entrevoit durant 3 minutes, dans La Guerre est finie, le bon Michel Piccoli, ce qui a justifié la vision éplorée de la chose ; et ajoutons que, à notre grand dam et étonnement, ce sera à peu près le seul intérêt de ce film, sûrement le moins bon de Resnais. Il n'y a dans ce morne portrait d'un "révolutionnaire professionnel" en plein doute que très peu de style, surtout venant de la part d'un des plus singuliers réalisateurs français. Au contraire : tout ça est raconté avec une plate linéarité, Resnais échouant à trouver un angle très net pour raconter son histoire. Il a beau tenter de donner le change en faisant éclater parfois des plans très serrés montés en rafale, pour exprimer des flash-back (ou forward) assez sentimentaux, comme un chaos d'images qui viendraient subitement envahir le héros, ce sera la seule chose notable à relever : le reste est raconté certes correctement, mais dans une continuité très sage. On se contentera donc de ça : une chronique précise et habitée d'une certaine période de la guerre civile espagnole, un défilé de seconds rôles attachants (Bouise, Fresson, Piccoli, Crauchet, Dasté, Bujold, Ferjac, et même Antoine Vitez pour un rôle de quasi-figurant), un noir et blanc joliment travaillé et la dignité forcément rattachée à ce genre de production.

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Nous voici donc sur les traces de Diego, militant révolutionnaire communiste, en exil à Paris. Toujours actif, toujours recherché, il se rend pourtant compte que son combat pour la cause espagnole est perdu d'avance, voué à l'échec ("on tombe tous"), et en quelque sorte démodé : l'Espagne est devenue un piège à touristes où les convictions de ces derniers Mohicans de la cause font figure de folklore dépassé, où leurs risques sont pris de haut par les nouveaux militants (des jeunes étudiants maoïstes et activistes pré-soixante-huitards), où leurs codes secrets et leurs mots d'ordre solennel passent pour des gadgets d'espion de seconde zone. Diego, paranoïaque et tourmenté, est donc condamné à dresser un bilan de ses années de lutte, mis face à ses doutes et ses contradictions, toujours menacé par la police et les trahisons internes. C'est l'immuable Jorge Semprun qui signe le scénario du film, on n'a donc aucun doute sur la sincérité, la vérité et la noblesse d'âme de ce qui nous est raconté. Revers de la médaille, le scénario est très littéraire, assez démodé aujourd'hui : Semprun voudrait densifier la moindre seconde du film, lui donner une solennité, une éternité, un panache forcé, qui finissent par alourdir irrémédiablement la chose. Un soupçon de réactionnarisme, du genre "la guerre, c'était mieux avant, p'tits cons", vient d'autre part peser sur cette histoire : Diego est un vieux de la vieille, qui sait ce que c'est que de risquer sa vie ou d'obéir aux ordres, et il se retrouve face à un monde (et notamment une femme, Ingrid Thulin) qui ne comprend plus sa rigueur.

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Ce ton très sérieux est aussi dû à Yves Montand, vraiment pas bon dans le rôle, qui a du mal à se sortir de ces répliques très littéraires et de ce scénario trop théorique pour être naturel : il sert son habituel numéro d'intellectuel de gauche, mais ne parvient pas à trouver l'ampleur des films de Costa-Gavras ou de Melville, beaucoup mieux écrits. Scénario lourd, acteurs moyens : Resnais est condamné à surfer entre tout ça, et, s'il sert un film politique tout en dignité et en vérité, il a beaucoup de mal à signer réellement la chose, trop phagocytée par les "professionnels de la profession" que sont Montand et Semprun. Il se contente donc de longues scènes dialoguées (et souvent confuses), dynamisées de temps en temps par quelques belles petites choses : la photo, de jolis extérieurs lors de la ballade en voiture avec Thulin, une belle musique, des seconds rôles crédibles.

gg

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