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GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
13 mai 2020

La Vengeance aux deux Visages (One-Eyed Jacks) (1961) de Marlon Brando

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Voilà un western absolument épatant qui nous permet d'un coup d'un seul de faire toute l'odyssée Brando. Un western d'une beauté époustouflante (merci Scorsese et Spielberg pour la rénovation, c'est pas tous les jours), qui jouit d'une lumière et d'un décor de paysages marins remarquables en tout point, avec forcément, en prime, l'animal Brando qui n'a même pas à prendre la peine pour susurrer ses dialogues d'ouvrir les lèvres : c'est lui qui dirige, il est le boss. Une histoire d'amitié entre Marlon Brando et Karl Malden, une histoire de trahison, de pifs aussi, une histoire de vengeance, et en prime, pour notre chasseur Brando, une histoire d'amour (Pina Pellicer ! Une carrière stoppée prématurément). La trame est certes simple comme bonjour : un casse, une traque, une trahison et Brando en prison. Une recherche, des retrouvailles (Malden, passé du Mexique à la Floride, est maintenant shérif, l'enfoiré) et des complications (Brando pense simplement piller une banque et descendre son ex compagnon... mais celui-ci est retors et rusé !!!). Cerises sur le gâteau, Brando tombe amoureux de la fille adoptive de Malden et tue au passage un connard (le sosie de Nicolas Cage) qui violente une femme : un petit côté sensible qui sied forcément mal à une vengeance longuement murie. Qu'ajouter ?

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Comme dans tous les bons westerns, ce qu'il faut réussir avant tout c'est les temps morts. Brando place la barre haut en se donnant 2h20 pour résoudre sa trame mais parvient haut la main à relever le défi. Car l'animal Brando n'a pas forcément besoin de scènes d'action pour captiver l'attention : qu'il taille la bavette avec une pute blonde mexicaine, qu'il discute le bout de gras avec son ex acolyte plus finaud qu'une fouine ou qu'il mange la feuille avec cette douce Louisa (il est suave, il l'embrasse, il ment, il la fait pleurer, il l'aime... il lui raconte toute l’histoire de sa vie en une nuit et il est tout le temps crédible l'enfoiré), toutes ces séquences, magnifiquement éclairées et écrites, sont absolument hypnotisantes. On aime ces discussions qui n'en finissent jamais, dont on connaît le double fond, les allusions et qui s'achèvent toujours en nous donnant envie de nous frotter les mains : oh putain ça va barder, c'étaient simplement quelques petites minutes de répit avant l'explosion - qu'il s'agisse d'une explosion de haine (la vengeance) ou d'amour (Brando a un cœur même s'il le cache sous des tonnes de mensonges éculés). Alors oui, l'animal se cassera les dents à plusieurs reprises avant de trouver le chemin de la rédemption : crucifié par Malden qui le fouette et lui pète la main droite, enfermé par Malden qui souhaite le voir crever au bout d'une corde, Brando n'en finit pas de chuter en raison d'une certaine naïveté ; l'animal se fait trahir par trois fois parce qu'il ne peut s'empêcher d'avoir une certaine foi envers son ex compagnon de casse. Mais il y a heureusement un Dieu pour les suaves et l'animal, après avoir serré des dents plus souvent qu'à son tour, retrouve toujours l'opportunité de se venger. L'histoire est simple, certes, les obstacles attendus, mais on se passionne pleinement pour la chose tant l'objet westernien est beau (des collines mexicaines à ce bord de mer floridien, mon coeur chavire - le western est l'occasion de connaître des endroits déserts dans lesquels on mettrait jamais les pieds...) et tant les personnages, qu'ils soient fourbes (Malden), puissants (Brando) ou tendres (Pellicer), sont bien dessinés - avec en plus, mon petit délire perso à moi, la présence d'Elisha Cook (apparence fugace mais décisive !). Le meilleur film et de loin réalisé par Brando, une pépite pour tous les amoureux de temps morts magnifiques.

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Go to the Mid-West

Commentaires
H
Il me semble aussi me souvenir qu'à cause de la très longue production du film (en gros trois ans), Brando change de corpulence d'un plan à l'autre, quasiment. En revanche, j'avais oublié (une des photos ci-dessus me le rappelle) qu'on y trouve Elisa Cook Jr, que j'ai toujours adoré...
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H
Des westerns où l'on voit l'océan, il n'y en a pas tripette (on y trouve plutôt des lacs et des cours d'eau intérieurs — l'océan, c'est la fin de la conquête) ; rien que pour cela, ce 'One-Eyed Jacks' vaut le coup d'œil. Et puis il y a Timothy Carey (dans une scène courte, certes), qui était plus réellement dingue et incontrôlable que Nicolas Cage (Philippe Garnier a écrit des pages assez étonnantes à son sujet). Je me rappelle d'un plan général bouleversant : celui où Brando passe à cheval au-dessus de la falaise sans voir son copain (mais nous, spectateurs, le voyons, tout petit dans le cadre) qui, quelques mètres plus bas, est en train de clamser parce qu'il n'a pas voulu le trahir. Un raccord entre deux plans vaut aussi son pesant de cacahuètes : il donne l'impression quasi physique d'assister au coup de crosse du fusil de Malden qui écrase la main de Brando, alors qu'en fait on ne voit rien du tout. Le rythme général du film a dû souffrir de son tournage erratique, mais malgré le côté très poseur de Brando on y trouve mille beautés (dont la moindre n'est pas celle, très émouvante, de Pina Pellicer), et une reconstitution-sans-le-dire de la célèbre évasion de prison de Billy le Kid qui est sans doute la meilleure que j'ai vue à l'écran (mieux que chez Arthur Penn et Peckinpah, dans mon souvenir).
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F
Les états d'âme du casseur-narcisse-macho dans de beaux décors et avec d'excellents seconds rôles ne vont effectivement pas sans des temps morts obligés qui peuvent paraître un peu longs. Sergio Leone a déblayé tout ça.
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T
La malheureuse petite Pina Pellicer, au jeu si sensible (dont vous ne dites rien, ah si, un point d'exclamation!) n'a pas supporté d'être jetée par l'animal Brando... Elle s'est suicidée deux ou trois ans après le film. <br /> <br /> C'est vrai qu'il est beau (le film) et assez déjanté.
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