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Shangols
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20 mars 2020

1917 (2020) de Sam Mendes

1917

Cela faisait longtemps qu'on ne s'était pas pris des éclats d'obus dans la tronche, et c'est chose faite avec cette plongée dans les tranchées signée par le camarade Mendes (anglais, je le rappelle, et qui part donc avec un handicap). Great camera work ! Great great great camera work, my friend, et Lelouch pourrait manger au passage toutes les bobines de ses films pour expier. Mendes décide de filmer la chose en plan-séquence, ce qui, on le devine, nécessite une préparation de folie. Alors oui, il triche ici ou là, of course, avec un plan sombre, ou un objet filmé en gros plan qui permet de faire la jonction. Mais rien de tel pour se sentir totalement immergé dans cette mission, dans cette marche en avant, dans ce véritable marathon semé d'embuches, infernal. Le scénar tient sur un bout de papier, tout comme le message à livrer : il faut abandonner toute attaque, les Boches nous ont tendu un piège. Un message lourd de conséquence car 1600 personnes risquent d'y perdre bêtement la vie. Blake et Schofield sont les deux soldats désignés pour mener à bien leur mission ; Blake, outre le fait que c'est un as de la carte, a été choisi pour une simple raison : son frère fait partie du bataillon qui risque de se faire massacrer. Pas de temps à perdre, les deux hommes traversent toute leur tranchée et s'avancent à découvert sur la ligne de front. Ils ont moins de 24 h pour réussir leur mission, Jack Bauer est vert de jalousie.

Sam-Mendes-plonge-dans-les-tranchees-avec-1917

Oui, techniquement reconnaissons la gageure et le grand mérite (le seul ? Ah ben ça y est, le cassage commence) de cette œuvre de Mendes : ce "plan-séquence" (même truqué) permet de suivre les deux hommes en continu dans le flux de leur émotion, dans les moments de soulagement (de courte durée) comme dans les moments de doute (le reste du temps) ; guère de répit en effet pour nos deux soldats qui, dès qu'ils croient pouvoir souffler, viennent se faire emmerder par un rat, une balle perdue, un fil de fer, une voiture qui s'embourbe, un avion abattu qui leur tombe dessus... Bref, nos deux jeunes gens se retrouvent constamment blêmes, crevant de peur devant l'idée même de foirer leur mission. Mendes livre quelques séquences parfaitement bien menées et encore une fois diaboliquement filmées : cette traversée du pont ou cette chute dans la rivière (qui se transforme en pur canyoning) sont filmées au cordeau avec une caméra qui semble miraculeusement suspendue dans les airs. C'est efficace et là encore cela sert son sujet : ne pas quitter d'une semelle nos deux hommes dans les hauts et les bas de leur aventure de folie. Bien. Un voyage au bout de la nuit (qui viendra forcément), au bout de l'enfer (plus ils croisent d'hommes plus les blessés affluent - le carnage est proche) qui tient relativement en haleine sur 110 minutes.

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Après, dira-t-on, what else ? What else, what else, pas grand-chose, j'ai envie de vous dire... On est certes dans l'action mais pour l'émotion il faudrait changer de bonhomme. Quand Mendes tente de ralentir son récit (la mort d'un soldat ou la rencontre avec une petite Frenchie calfeutrée), on éprouve, c'est peu de le dire, pas vraiment de montée d'émotion... On regarde la chose un peu béatement, en attendant que la course contre la montre reprenne. C'est toujours le problème dans ce genre de film où l'action, la reconstitution, la technique focalisent l'attention ; dès lors que le rythme ralentit, il faut être sacrément fort pour trousser des scènes qui soient au niveau. Et Mendes, franchement, n'a pas les épaules. Les nappes musicales ont beau essayer ici ou là de donner un air de tristesse infinie à l'aventure, on reste un peu de marbre devant cette expédition qui, finalement, nous laisse loin des êtres humains, de leur sentiment, de leur histoire. 1917 demeure un film de guerre joliment filmé, mené tambour battant, et parfaitement taillé pour les Oscars : de la forme soignée et de l'émotion pop-corn. Du frisson sans le poil(u) qui se dresse.   (Shang - 17/01/20)

1917-photo-1093599-large


Bah bah bah une bonne grosse daube et puis c'est tout, voilà ce que j'en ai pensé, après les deux heures de somnolence parfois rythmées par un énervement profond. La grande mauvaise idée du film, outre les 300 autres, c'est ce fameux plan-séquence, qui ne veut plus dire grand-chose aujourd'hui d'ailleurs, avec les effets numériques. N'est pas Hitchcock ou Sokourov qui veut, et on a du mal à voir où est la prouesse dans ce film où tout peut être facilement rectifié d'un coup de palette graphique. Pourtant, la prouesse et l'admiration béate du spectateur semblent bien être les buts recherchés par Mendes, qui se moque bien de la chose à raconter avec son plan-séquence, du moment que ça claque. Le travelling est affaire de morale, certes, et le plan long aussi, ajouterais-je. Que ce "truc" de cinéma soit au service d'une reconstitution d'une bataille de la première guerre ne gène absolument pas le réalisateur, qui se sert de l'Histoire pour se faire briller. Mon camarade parle de l'absence d'émotions, mais c'est pire que ça : pas une seule seconde on ne ressent la tension, l'angoisse de la mort, la violence inouïe. Ç'aurait pourtant dû être la moindre des choses de ne pas utiliser ces événements mais de tenter de leur rendre leur densité. Mendes oublie à cause de cet effet inutile tout ce qui fait le cinéma, ne met rien en scène, regarde tout sous l'angle de "comment je vais bien pouvoir faire pour ne pas couper ma caméra à ce moment-là ?", ne porte aucun regard sur ce qu'il filme, qui pourrait être aussi bien la reproduction des otaries que la bataille des Ardennes. La guerre de 14 ? du fun du fun du fun, un immense terrain de jeu. Du coup, on n'a jamais eu autant la sensation, avec ce plan-séquence, d'être dans un jeu vidéo en démonstration (jouez deux minutes à Medal of Honor, et vous me comprendrez), avec ses épisodes, ses niveaux à franchir, ses décors variés ; mais un jeu auquel on n'aurait pas le droit de jouer. Y compris d'ailleurs dans ses effets spéciaux souvent miteux (la traversée du champ de bataille, la plongée dans le fleuve, affreux écrans verts) et dans tout ce qui ne concerne pas, justement ce plan-séquence : les acteurs sont nuls, le scénario crétin et manichéen (les Allemands sont de gros empaffés qui te vous poignardent un type qui leur tend la main ou vous dénoncent même agonisants), les scènes calmes clicheteuses, le mélodrame sirupeux à chaque coin de rue... Mendes a dû apprendre le cinéma dans le même fascicule que celui où il a appris l'histoire : 1917 est nul, douteux, moche et crétin, et mortellement chiant.   (Gols - 20/03/20)

1917-1

Commentaires
N
ouh là pas d'accord. c'est un film qui est le contraire d'un exploit technique, c'est une sorte de variation ouatée sur Orphée et Euryidice, doux comme un songe, simple comme un conte. Je crois que ce n'est même pas un film de guerre. c'est beau comme un Camille Corot.
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