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7 novembre 2019

La belle Nivernaise (1924) de Jean Epstein

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Jean Epstein, qu'on ne présente plus en ces colonnes, nous fait son petit coup d'Atalante (oui, bon, c'est moins légendaire, indiscutablement) en adaptant un bouquin de Daudet. Une péniche (La belle Nivernaise, c'est elle - ce ne pouvait pas être une fille du coin, je les connais malheureusement), le père et la mère Louveau à la barre (c'est lui qui boit mais c'est elle qui a une dangereuse tête d'alcoolique - de belles tronches de petites gens, d’ailleurs, comme on en fait plus), leur fille (entre la cruche et le lama à poil long... mais on va pas ergoter sur les critères de beauté vintage) et leur équipier, un sale type qui ressemble à Jean-Louis Aubert dernière partie de soirée. Le père aime à boire son petite verre quand il est à quai, à Paris, et qu'il vient de vendre son bois mais il a aussi le coeur sur la main : c'est ainsi qu'il décide d'adopter un pauv'chtit gars des rues abandonné... La mère gueule mais elle la ramènera moins dix ans plus tard alors que le chtit est devenu un fier jeune homme... Celui, par exemple, qui tire la tronche c'est Jean-Louis qui en pince pour Clara (on sent le pervers) et qui, forcément, est jaloux de Victor (l'ex enfant sauvage) qui risque de lui piquer son taff et... la jeune fille. Lors d'une scène centrale épique, l'on découvre, en montage alterné, l'équipier s'en prendre à Clara et fracasser Victor (alors même que le bateau dérive) pendant que le père Louveau apprend à son propre vendeur de bois la nouvelle terrible qu'il vient d'apprendre par la gendarmerie : Victor est son fils mais il aimerait tant le garder... Si Victor parvient à se débarrasser de Jean-Louis (« plâtre et ciment » tombe à l'eau et ne reverra jamais la surface), il lui faudra tout de même quitter le navire et rejoindre son père biologique... La dépression ne va pas tarder à tomber sur la belle Nivernaise ainsi que sur ce pauvre Victor qui se retrouve sur les bancs d'une école de commerce tout nostalgique de sa vie d’antan...

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Sans faire de jeu de mots bêta (c'est pas le genre de la maison), le film est particulièrement fluide et s'avale en une bouchée (les films muets sans musique me paraissent toujours super courts - bon, il y a peut-être une pointe de mauvaise foi dans cette réplique mais je m'y tiens quand même). Epstein dope ses quelques situations dramatique en se faisant le roi des gros plans : qu'il s'agisse des gueulantes de la mère Louveau (pas une commode la Josiane), du pugilat entre l'équipier, Clara (à deux doigts d'être violée) et Victor (la tronche en sang : un broc en pleine poire, j'ai toujours dit que c'était ce qu'il y avait de pire) ou encore du délire de Victor sur la fin, alité et à l'article de la mort. Le film n'est pas feignant non plus au niveau du montage ou des angles de prise de vue un poil originaux (la pièce principale de la péniche prise en plongée, la péniche en général, filmée sous toutes les coutures avec parfois une caméra posée au sol du meilleur effet (rasant) ; cela reste tout de même au niveau filmage plus sage que certains Epstein par la suite). Après c'est vrai que les acteurs abusent un peu de la grimace (Victor, des faux airs de Gabin jeune mais aussi un jeu un peu faux ; Clara, assaillie, qui se prend pour Marie Shelley mais qui continue malgré tout de faire penser à un lama - horrifié, certes, mais un lama) . Dans les scènes de romance entre Clara et Victor, on y croit un peu plus : les visages sont posés, les regards alanguis et une certaine sérénité se dégage de la pellicule. Le romantique Victor invite même sa douce dans un cinéma bondé (ok, il n'y a que douze places mais on ne va pas jouer les rabat-joie) et on assiste là aussi à une séquence toute mimi où les deux têtes s'aimantent. Le final est un peu surprenant a posteriori (on imagine mal aujourd'hui un curé se déplacer dès qu'on fait l'achat d'une nouvelle bagnole...) mais apporte là encore son petit lot de joie apaisée. Une belle œuvre d'Epstein, sans doute un tantinet plan-plan parfois, à découvrir au fil de l'eau.

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