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26 septembre 2019

La Cérémonie (Gishiki) (1971) de Nagisa Ôshima

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Voilà un film plutôt rugueux d'aspect, aux décors minimalistes (limite décors brechtiens ajouterait mon comparse), à la musique « malaisante » (des sons violonneux qui foutent le bourdon dès les premiers accords) qui s'intéresse tout bonnement à une famille nipponne, dans l'après-guerre : vingt-cinq ans de malaise, de relations incestueuses, d'amours rêvées, d'amours non consommées, d'espoirs et de crises - oulà, un truc ardu en somme ? Parfaitement. On sent, encore, dans ce Japon qui essaie de se réinventer tout le poids des coutumes ancestrales, des mariages arrangés, le droit de cuissage, les tabous, les non-dits, les seppuku... Pourtant, il y avait dans le regard de ce bambin, dans les souvenirs de cet adulte qui restent prégnants, beaucoup de belles choses : lui, né en Mandchourie, dont le père est mort, n'a pu se soustraire avec sa mère à sa famille – le grand-père les empêche de faire leur vie ailleurs ; passant le reste de son enfance au Japon, il garde tout de même en tête des images heureuses : des parties de base-ball avec ses cousins, sa cousine, tout cela sous le regard de la mère d'icelle ; un regard qui le porta durant toutes ses années et dont il tomba en quelque sorte amoureux dès son plus jeune âge... Seulement voilà, rien n'est simple... Il se pourrait que sa cousine (la fille de cette femme donc) pour laquelle il a aussi le béguin une fois devenu ado, soit sa demi-sœur... Ouais, ça fait réfléchir... Et ce n'est pas la seule chose qui met mal à l'aise notre garçon : le fait que son grand-père ait violé, par exemple, la mère de cette demi-soeur... Ou encore que son cousin ait aussi couché avec cette femme pour s'initier à l'amour... avant de passer la nuit quelques années plus tard, avec sa fille. Oui, pas simple... Notre héros a de quoi être un peu déboussolé et perdra méchamment pied le soir de son mariage (la mariée s'étant fait la malle) en cherchant à dormir dans le cercueil de l'un de ses cousins mort accidentellement cette nuit-là... Vous êtes perdu ? Oui, il y a de quoi y perdre un peu son latin dabs ces rapports plus que retors...

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La mise en scène d'Oshima est tout entière dévouée à ces acteurs qui tentent de trouver leur repère dans ces vastes décors, au cours de cérémonies infinies (la famille se retrouvant surtout pour les mariages et les enterrements) ; c'est à chaque fois l'heure des règlements de compte, les chansons entonnés par chacun ayant du mal à dissimuler le mal-être des uns et des autres. On touche au paroxysme de la mise en scène pour sauver la face avec ce mariage sans mariée où chaque individu fait comme si elle était là... On sent que cette famille tenue d'une main de fer par le grand-père étouffe derrière ces principes à la con et que notre héros et sa cousine (la complicité entre eux étant évidente) auront toutes les peines du monde à trouver leur place, pour ne pas dire leur bonheur au sein de cette famille où les secrets sont aussi lourds que le poids de l'Histoire. On suit la chose en s'accrochant un peu au siège (c'est bougrement bavard) en appréciant tout de même ce terrible jeu de dupes entre chacun des personnages, cette difficulté pour chacun d'exprimer et surtout de vivre ses désirs... Plus le récit avance, plus notre héros se retrouve en position du dindon de la farce dans cette œuvre aux accents tragi-comiques où la mort côtoie sans cesse l'amour. Un peu ardu d'accès, disais-je, un peu déroutant culturellement (et pourtant ce n’est pas faute de ne pas me pencher sur le cinéma nippon) mais finalement assez remuant dans ces rapports familiaux et sentimentaux traités à l'os. Malséant, saignant, ôshimiant.

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