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3 juin 2019

L'Armée (Rikugun) (1944) de Keisuke Kinoshita

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On termine avec les films de propagande de la toute première période de Kinoshita. L'Armée a un petit côté ambitieux en essayant de traiter à travers le temps plusieurs « périodes de guerres » nippones, mais fatigue un brin par le discours répétitif de son personnage principal, Tomosuke Takagi, interprété avec fermeté par Chishû Ryû : il faut savoir se sacrifier pour la mère patrie - et l'Empereur, of course - ; la guerre n'est pas une partie de rigolade, qu’on se le dise, nom de Dieu. Tomosuke va d'ailleurs tout faire pour éviter que son premier fils devienne une chique ; il rêverait d’en faire un soldat digne de ce nom - c'est pas le discours qu'on préfère... La mère d'ailleurs ne vaut pas mieux puisqu'elle va notamment pousser son fils à sauter d'un pont - comme le font les autres gamins du quartier - pour ne pas passer pour une lopette... On apprécie au passage les ponts de Fukuoka, seule ville nippone que je connais comme ma poche (bon, après, faut pas forcément me prendre au mot...). Le fiston, devenu grand, fera ses classes comme un gaillard et partira à la guerre le sourire aux lèvres comme le roi des couillons, on peut briser là tout suspense à propos de la chose...

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Si on voulait franchement retenir deux-trois scènes marquantes, on pourrait piocher dans les suivantes : tout d'abord, les scènes de discussions animées entre Tomosuke et des quidams ; Tomosuke s'offusque promptement dès lors qu'on essaie de toucher de près ou du loin à l'honneur de l'armée japonaise ; le type maugrée derrière sa moustache, envoie deux-trois saillies mordantes et guère diplomatiques et se lève de défi devant son interlocuteur... Un côté pur et dur qui finirait par être presque drôle dans sa droiture - mais c'est vrai que je ne respecte rien. Plus intéressant sans doute, cette scène plus touchante où les deux fils de la famille massent leur parent... C'est la première fois qu'une larme vient poindre dans l'œil de la mère et l'on se dit qu'un peu d'émotion dans ce discours guerrier de merde apporte enfin une touche d'humanité. La mère récidivera dans la dernière scène - de loin la plus emballante : elle décide au dernier moment d'aller se joindre à la foule pour saluer le départ de son fils à la guerre. Elle le cherche, le regard paniqué, parmi les soldats qui marchent d'un pas décidé dans la grand-rue, puis, tel un supporter à la con du Tour de France, décide de le suivre en courant, marchant au passage à moitié sur la foule en délire qui agite des drapeaux... Un long travelling assez échevelé qui laisse à nouveau poindre l'émotion ; oui, il y a chez elle de la fierté à voir son fils partir mourir (...) mais on ne m'enlèvera pas de l'idée qu'il y a enfin en elle comme un pointe de panique maternelle qui refait surface... Elle semblerait être capable de le suivre jusqu'au front - alors même que ses jambes la portent à peine et que son visage se liquéfie à vue d'œil. Une séquence finale plutôt émouvante et magistralement mise en scène comme pour nous récompenser d'avoir suivi jusque-là ce film un peu morne sur la forme. A suivre... pour toujours plus de plaisir.

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