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26 mai 2019

Le Repentir (Back Pay) (1922) de Frank Borzage

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Rien de tel pour célébrer un anniversaire (28 printemps si on enlève le foie) qu'un petit Borzage inédit. Et pas un truc obscur et foireux, attention. Back Pay (1922, presque un siècle, fusil – entièrement conservé) est l'histoire d'une simple fille vénale de la cambrousse, Hester Bevins (Seena Owen) qui part "réussir" à New-York : elle y parvient non point à la force du poignet mais grâce à la bienveillance d'une sorte de sugar daddy de Wall Street. Elle enchaîne fiesta sur fiesta et oublie vite son aspirant amoureux, Jerry, resté comme une âme en peine dans sa campagne... Seulement voilà, en 1917, pendant qu'elle fait la belle et la bombe, l'autre se prend des balles et des bombes (très joli parallèle effectué entre les deux scènes : se tenir les bras en l'air n'ayant définitivement pas la même signification pour l'un et l'autre). Jerry revient aveugle avec un poumon plus fébrile que celui de Gols. Il lui reste trois semaines à vivre, bigre. Hester va venir à son chevet et pour le rendre ultimement heureux se marier avec lui... Facile sacrifice quand on voit le temps qu'il reste à vivre au bougre... Seulement la rédemption d'Hester ne fait que commencer : à la mort de Jerry, le fantôme d'icelui fait prendre conscience à la belle (enfin, la belle, la belle, c'est relatif, surtout avec son âme de "crêpe-de-Chine") qui lui faut radicalement, pour être en paix avec elle-même, changer de style de vie... L'argent ne fait décidément pas le bonheur, surtout celui de la conscience.

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Petite merveille exhumée et restaurée par The Library of Congress qui ne peut que faire notre bonheur. Scène champêtre reposante ou scène urbaine trépidante, le film alterne avec un vrai sens du rythme la vie de patachon d'Hester (sans cervelle à New-York - son caprice pour avoir un vison à 22.000 boules, un montant totalement indécent pour les gilets jaunes de l'époque et pour Bougrain-Dubourg et sans repère dans sa bourgade d'origine quand elle daigne y revenir - seul ce bon Jerry semble se souvenir d'elle). Et puis il y a ce fameux tournant du match quand Jerry (séquence courte mais prenant aux tripes) tombe sur le front. Hester, progressivement, face à ce cadavre non déambulant (ah putain, un lit d'hôpital dans un Borzage, on retrouve ses bonnes vieilles bases : j'ai joui) un type mourant et aveugle qui va finir par ouvrir les yeux de notre héroïne (j'ai abusé du rhum, je vous l'accorde). Le pauvre Jerry est une loque, filmé qui plus est dans le l'ombre, ce qui met d'autant plus en lumière le désarroi d'Hester. C'est le début du remonté de pente et du regain de fierté : les cauchemars et les hallucinations d'Hester (Jerry, dead, is still around, sous forme d'ectoplasme, à la fixer dignement de son regard retrouvé) vont non seulement la tournebouler mais surtout la remettre sur le droit chemin ; faire payer les frais d'obsèques de Jerry par son sugar daddy, comment peut-elle oser ? La vénalité a ses limites et son sens de l’honneur finit par reprendre le dessus. Certes, l'actrice en fait des tonnes dans le côté mélodramatique et torturé et la fin tire un peu en longueur - vu toutes les mines qu'elle prend, c'est un véritable exorcisme... Mais le final sera d'autant plus libérateur. Un Borzage sentimentaliste à souhait : mieux vaut trouver l'amour dans la mort que de le noyer sous l'argent facile. Une morale saine et un film aussi trépidant (bon, ok le dernier quart d'heure est plus assagi) que l'agitation et le trafic dans les rues new-yorkaises. Nirvana borzagien que cette pépite joyeusement offerte à mes yeux.

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 A l'aborzage !

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