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25 mai 2019

Ocean's 8 de Gary Ross - 2018

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Un peu de distraction entre un Bartas et un Dardenne, ça peut faire du bien, surtout que Ocean's 8 s'inscrit dans la lignée de la série plutôt fun de Soderbergh (ici producteur) et que j'aime bien les films de braquage. Weinstein oblige, c'est cette fois-ci un casting uniquement féminin qui organise le hold-up, histoire de prendre toutes les précautions d'usage en terme de parité : les gonzesses prennent le pouvoir, la distribution est clinquante et froufroutante comme dans les pages de Vogue, et il n'y a même aucun acteur masculin dans les rôles principaux (si on excepte un couillon, représentant du mâle dominateur et sans scrupule, qui se fait avoir comme un bleu). Bon, ok. Les dames, sous la direction de Sandra Bullock, organisent comme il se doit le braquage du siècle, le fabuleux collier hyper-rare qu'on a vu dans tous les films de ce genre, qu'elles vont piquer durant une grande réunion, le gala du MET. Chaque participante, c'est la règle, a sa spécificité : l'acrobate, la pro de l'informatique, la bimbo, la perceuse de coffres, le cerveau, etc. On connaît la chanson, c'est toujours la même chose, et le plaisir est là de se faire raconter une énième fois la même histoire, façon conte pour enfants, avec ses rebondissements pas poss, ses échecs et ses brillantes réussites, ses surenchères de dernière minute, ses vannes bon enfant, etc. Bien.

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Le souci, c'est que le film, réalisé par un homme et joué par des femmes qui ont l'air de considérer leur statut comme un artifice, propose à peu près le contraire de ce qu'il voudrait dire. Toutes les actrices sont apprêtées comme au bal, tout en apparat, choisies de toute évidence pour leur plastique avantageuses plus que pour leur talent de comédiennes, entièrement contenu dans leurs tenues rutilantes et leurs boules avantageux : Bullock, Rihanna, Hataway, Paulson, même Blanchett, toutes semblent poser pour la galerie, rivalisant de charme et de gambettes pour montrer que les femmes sont au pouvoir. C'est vrai qu'elles sont aussi assez géniales, puisque leur braquage se passe très bien merci, et même ne subit aucun revers, se déroulant peinardement comme prévu ; aucun danger donc dans son exécution, aucun risque pris par les belles, on reste dans le confortable et la moquette épaisse. Cette intelligence, alliée à la plastique de ces dames et à leur humour, en font des sortes de super-héroïnes, et on veut bien que ce soit le style de la série (Pitt et Clooney étaient aussi sans défaut), on se dit quand même que Ross est passé à côté d'une occasion de faire un vrai film de femmes entre elles, fin et puissant. Il eût fallu montrer ces braqueuses prises dans un monde masculin, qui déifie la virilité, aux prises avec des prédateurs ou des crétins, mais pas les exfiltrer du monde pour servir un scénario beaucoup trop lisse. Bullock, au début, annonce qu'elle sort de prison avec 45 dollars en tout et pour tout en poche ; on la retrouve la scène suivante dans un loft qui pourrait contenir 17 fois mon appart, devant une maquette du MET qui a l'air de coûter le PIB de la Pologne, équipée jusqu'aux dents de nouvelles technologies et habillée de robes sexy à faire pâlir n'importe quel mannequin. Dans ce monde parfait, où rien n'est dangereux, où l'argent coule à flots, où les filles sont sexy et fun et futées et géniales, rien ne semble vraiment avoir d'importance, et du coup Ross rate la partie la plus importante de son film : le casse, qui se déroule dans une indifférence générale ; la mise en scène n'aide pas d'ailleurs, montage cut avec un plan toutes les secondes, dopage de n'importe quelle scène avec des lumières et de la musique trop glamour, anonymat complet dans le style. Alors, oui, on reste amusé par la mécanique de la chose, on ne s'ennuie pas vraiment. Mais à ce niveau de réalisme-là, autant se taper un bon vieux Cocteau.

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