Astérix : Le Secret de la potion magique d'Alexandre Astier & Louis Clichy - 2018

Mouairf allez, bien luné, voilà un film d'animation bon enfant qui peut à la rigueur passer. C'est vrai que dans tous les autres cas, et si entre autres vous cherchiez dans cet épisode un peu de l'esprit de Kaamelott, vous feriez mieux de passer votre chemin : Astier lisse encore un peu plus son style depuis le relativement sympathique premier opus, et nous sert un petit film très familial qui ne cherche que votre confort. Fi du relatif mauvais esprit de jadis, place à nos valeureux Gaulois gentils, nos petits enfants seront rassurés. Bon, niveau style personnel, Astier y va quand même assez franchement, pimentant même son histoire (originale) de quelques thèmes assez étrangers à l'univers d'Astérix : il est question là-dedans de transmission, le druide vieillissant étant soucieux de confier la recette de la potion magique à la jeune génération en prévision de sa fin prochaine. Les personnages de la BD, on le sait, ne vieillissent pas, et voilà donc que l'angoisse du temps qui passe, l'ombre de la mort, la peur de la disparition viennent hanter nos Gaulois. Tout ça se fait dans la douceur, certes, mais c'est bien la première fois qu'on a conscience qu'Assurancetourix peut mourir ; tout comme c'est la première fois qu'on prend conscience que le village est peuplé de générations différentes : les enfants prennent ici une place centrale, en temps que symboles de ce qui viendra après, certes, mais aussi comme porteurs d'avenir. Les thèmes nouveaux apportés par Astier ne manquent pas : il y a une petite variation féministe dans ce village confié au barde en l'absence du chef, mais très vite repris en main par les femmes, qui vous saccagent des légions de Romains aussi bien que les hommes ; il y a ce fait, qu'on n'avait jamais réfléchi : la potion magique n'est destinée qu'au village d'Astérix, alors qu'elle pourrait aider tout le peuple gaulois à se rebeller contre le joug de César ; il y a l'arrivée d'un vrai méchant (même s'il est raté), fait très rare dans l'univers de notre héros, peuplé de vilains ridicules et risibles.

Bref, Astier, au risque de la trahison, amène du neuf : ça marche souvent, ça se vautre aussi parfois, comme dans ce final gênant où s'affrontent des sortes de robots Transformers très laids, surenchère de chaos très (trop) éloignée de la douceur ronde de l'univers d'Astérix. Les dernières 20 minutes sont affreuses, pour tout dire, laides, pas dans l'esprit... De toute façon l'animation est peu inventive, et lisse les personnages avec trop d'application ; c'était déjà le cas précédemment, ce Louis Clichy a l'air de n'avoir jamais ouvert un album d'Astérix et de s'être contenté de mater du Pixar. On assiste à un défilé de personnages "trop bien faits", placés d'ailleurs dans une mise en scène souvent hystérique (la première scène, illisible), qui utilise à outrance la dommageable mode des plans d'une demi-seconde pour donner une impression de rapidité : il y a deux fois plus de rythme dans les dessins fixes d'Uderzo que dans cette débauche de bouts de plans raccordés bout à bout tous les centièmes de seconde. Une fois tout ça dit, c'est vrai que le film est assez agréable dans ses détails, notamment dans le doublage délicieux des acteurs, ou dans ces mille petits trucs semés ça et là pour nous faire marrer (même Jésus vient faire un tour dans le film). C'est souvent assez inventif dans les dialogues, les voix sont rigolotes, Astier a le sens de la suspension du temps (les deux Gaulois qui tentent d'inventer leur propre potion magique, mixture qui explose systématiquement aux moments incongrus), bon on ne crache pas dans le potage. Mais pour cette fois, on se contentera de sourire poliment devant la chose, et de suggérer à Astier de passer à autre chose...