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Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
11 décembre 2018

Borom Sarret de Ousmane Sembène - 1963

Une journée de la vie d'un charretier / chauffeur de taxi au Sénégal et malgré ses prières matinales, on peut pas dire que tout va se passer pour le mieux: client qui ne paie pas, femme enceinte qui s'endort sur son épaule, jeune riche qui le floue, gendarme qui lui confisque sa charrette... Le pauvre finira sa journé gros Jean comme devant (sa générosité l'ayant amené à donner son peu d'argent à un griot de rencontre) et lui aussi de se sentir un peu dans la peau d'un esclave. C'est réalisé tout de même avec beaucoup de légèreté et de naturel - scène terrible tout de même que celle du bébé mort qu'il amène au cimetière, dure réalité quotidienne -, toutes les qualités déjà du Sembene que l'on retrouvera dans l'excellent Moolade.   (Shang - 19/04/07)

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Un film qui a autant d'intérêt historique qu'artistique, c'est assez rare pour mériter le détour. Voici, messieurs-dames, le premier film réalisé en Afrique noire par un Africain noir (encore que cette information mériterait quelques recherches, je ne dis pas). Et qui plus est, par un maître, tout simplement, la simplicité de Borom Sarret lui donnant une sorte de qualité primale, un peu comme si la Nouvelle Vague avait débarqué dès ses débuts au Sénégal. Il y a en effet un petit côté Godard des débuts dans cette histoire faite de bric et de brocs, fabriquée avec les moyens du bord, mais qui a la sincérité et la force des premiers temps du cinéma, de la redécouverte du 7ème art. Le film raconte une journée d'un charretier dans le Dakar de l'époque, dans un mélange subtil entre documentaire et fiction. Le pauvre bougre convoie plusieurs clients, femmes enceintes qu'il faut conduire à la maternité, cadavre d'enfant qu'il faut mener au cimetière, différents voyageurs qui oublient de le payer, ... A chaque fois, le convoyeur se retrouve gros-jean comme devant, toujours aussi pauvre, et même quand il gagne quelques piécettes, il les dépense pour un griot un peu talentueux qui lui fait la roue. Il rencontre alors un dernier voyageur qui lui demande de l'emmener en ville, interdite aux pauvres : le gars s'en tirera chargé d'une amende, sans sa charrette, et les poches définitivement vidées. Quand il débarque chez lui, sa femme aura alors ce mot glacial : "Attends-moi : ce soir, on mangera", ce qui laisse augurer de ses activités pour résoudre le problème.

Le film est aussi démuni que son personnage : les dialogues sont réenregistrés en voix off, le filmage est de toute évidence souvent fait en contrebande, le montage est effectué à l'arrache. Mais la vérité éclate dans chaque plan, tout est authentique, fortement ancré dans la réalité sociale du pays, très tourmenté malgré le ton parfois légèrement comique. Sembène fabrique avec trois élastiques et un pot de yaourt un film très politique, qui en dit long sur les conditions de vie de la population pauvre de Dakar, indigné avec politesse, qui fait mine de rire pour ne pas avoir à pleurer. Il y a dans ce petit personnage frappé par le destin quelque chose du cinéma néo-réaliste, directement en phase avec un état social, très humaniste, très proche de ses personnages. La forme, quant à elle, rappelle les expérimentations des compères de la Nouvelle Vague. Le résultat est délicieux, instructif et très beau, avec ces plans d'ensemble documentaires qui alternent avec des gros plans très théâtraux sur les personnages, avec cette simplicité d'éxécution, avec cette douce poésie à la limite de la fable morale. Un très beau petit, tout petit film.   (Gols - 11/12/18)

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