Le Kid du Texas (The Kid from Texas) de Kurt Neumann - 1950
Un bien beau travail que celui de Kurt Neumann et son équipe pour cette petite série B très plaisante qui tente de rendre justice à la vie (courte) et à l'oeuvre (sanglante) de Billy the Kid. Oubliez tout ce qu'on vous a dit : William Bonney alias Billy the Kid était tout sauf le malfrat sanguinaire qu'on veut nous faire croire. Le film tente de le réhabiliter en lui faisant prendre les traits du juvénile et intense Audie Murphy, et en dressant un portrait touchant de la légende de l'Ouest. Solitaire, torturé par son passé, pris dans un engrenage de violence qu'il regarde avec une pointe de tristesse derrière l'indifférence apparente, romantique mine de rien, amoureux secret, Billy était somme toute une victime de la société pugiliste de son époque. Neumann nous le présente comme un être mystérieux, presque mythique, qui arrive dans le film aussi discrètement qu'une ombre et tombera sous les balles de Pat Garrett en emportant avec lui son secret. Sa seule faille était Irene Kain, une autre victime du droit de cuissage des hommes, jeune femme de son âge qui l'obsède jusqu'à ce qu'elle lui soit fatale. Des faits, rien que des faits : dates à l'appui, le film raconte le personnage en se targuant d'une vérité qu'il a tout de même un peu de mal à nous faire avaler. Mais tant pis : il y a dans ce personnage, et dans l'interprétation très digne de Murphy, une aura de mystère qui fait plaisir à voir. Si le fim est mouvementé et nous donne notre ration de scènes coups de poing, on reste surtout accroché à la psychologie de ce voyou seul et triste, qui traîne son destin perdu d'avance en restant fidèle à son sentiment principal : la colère.
Dans un très beau travail sur la lumière et les couleurs, dans un festival de plans tous plus beaux les uns que les autres (malgré leur évidente modestie), dans un sens de l'épure qui ne prend jamais son spectateur pour un con en lui expliquant tout, le film rend vraiment justice à ce caractère complexe, et s'attache à des personnages parallèles délicieux : les deux seuls amis du Kid, un Mexicain converti à ses actes comme un disciple à Jésus (pas mal de récurrences bibliques là-dedans) et un pauvre ivrogne un peu lâche qui ira jusqu'au bout de son admiration, ont toute leur place pour s'exprimer au milieu des personnages habituels du genre, méchants torves, propriétaires vénaux et homme de main à la gâchette facile. Le contexte de la guerre est très bien rendu, en tant que vecteur de la violence de Billy, et cette résolution romantique tranche avec les happy ends habituels du western. Autre tendance assez inattendue : la violence très sèche, filmée parfois frontalement, comme dans ce plan d'une demi-seconde montrant un gars qui se prend une balle en plein visage, ou cette bagarre hyper-rapide terminée en quelques coups de poing. Ces scènes asez impressionnantes tranchent avec des scènes un peu trop lentes et étirées, qui font parfois perdre le rythme. Mais voilà un film d'une honnêteté totale et d'une intéressante intelligence dans ses choix.