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17 octobre 2018

Histoire d'une Prostituée (Shunpu den) (1965) de Seijun Suzuki Noga

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Seijun Suzuki, qui nous a malheureusement quitté l'an dernier, était définitivement un très grand parmi les réalisateurs de "seconde zone" (sans condescendance aucune). L'Histoire d'une Prostituée se déroule en Manchourie : la Chine est alors occupée par le Japon et certaines demoiselles du pays du soleil levant viennent dans les garnisons pour "soulager" les soldats (sept gonzesses pour mille soldats, ça va, c'est pas l'usine non plus... - pardon). L'une d'elle, Harumi (les grands yeux sombres de Nogawa Yumiko), suite à une déception amoureuse, se jette à bras le corps dans cette "aventure" pour "connaître un maximum d'hommes". La belle va rapidement tomber sur un Capitaine pas commode prêt à la mener à la trique. Harumi jette alors son dévolu sur le larbin du Capitaine, un certain Mikami : si elle arrive à le domestiquer, ce dernier pourrait bien se retourner contre son maître... Bougrement malin comme raisonnement... Mais c'est oublier au moins trois éléments : l'un, c'est qu'elle puisse chemin faisant tomber amoureuse du jeune Mikami ; deux, c'est que l'avancée des troupes chinoises dans la région perturbe quelque peu leur idylle ; trois, c'est qu'à l'armée c'est la même règle que chez les tueurs : les femmes et l'alcool sont plutôt mal vues - Mikami n'a dès lors pas fait le plus dur dès lors qu'il éprouve un faible pour elle...

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De l'ambiance troupière (les hommes entre eux, et cette maudite manie de baisser sa braguette devant une femme comme devant un urinoir), de l'ambiance guerrière (les guet-apens tout comme les attaques chinoises sont des plus explosives), une pincée de moments suspendus amoureux (les trois photogrammes ci-dessus... quelques instants de solitude à deux et de silence dans ce monde de brutes), et de la violence, de la violence, de la violence (avec les femmes, entre Chinois et Japs, au sein même de l'armée jap). En cette période pour le moins troublée, notre petit groupe de femmes apporte un brin d'insouciance (elles ont toutes leur favori et rêvent de mariage à la moindre occasion) dans cette sauvagerie historique. Suzuki, c'est appréciable, n'est pas là pour jouer les patriotes : l'un des personnages secondaires, lecteur de philosophie, déserte et rallie les troupes chinoises qui semblent accueillir avec bienveillance cette recrue rejetée par les siens - le Capitaine des troupes japs étant, il est vrai, assez gratiné... Harumi baise au besoin (une certaine conscience professionnelle indéniable) mais se révèle également une héroïne diablement couillue et romantique... Lorsque Mikami est blessé sur le front et abandonné par les siens, elle franchit les tranchées sous les balles qui fusent et les obus qui pleuvent avec une insouciance amoureuse de dingue... Elle sauvera d'ailleurs son homme en le confiant à l'armée chinoise. L'amour pour elle est nettement supérieur à la dévotion pour la patrie et il est bien dommage que son amant (con de mâle) n'ait pas la même lucidité ; c'est elle encore qui fournit une grenade à son homme en prenant tous les risques pour que ce dernier puisse s'échapper... C'est tout du moins ce qu'il laisse entendre... Le final conjugue jusqu'au bout violence et romance et ce petit couple prend une véritable dimension légendaire dans ce contexte miné par la peur, la cruauté, la vengeance. Très belle pièce dans la filmographie d'un Suzuki toujours prompt à donner aux femmes des rôles puissants et à apporter un soin particulier à la forme - sans chichis.

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