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16 octobre 2018

Accord Final de Douglas Sirk (attribué à Ignacy Rosenkranz) - 1938

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Béni soit ce cher vieux Patrick Brion, qui, à 117 ans passés, nous propose encore de nous émerveiller devant des films rarissimes (celui-là, on doit pas être beaucoup plus que 6 à avoir veillé dimanche pour le regarder) ; en l'occurrence un film à l'histoire bizarre, français mais réalisé par un Allemand et signé par un prête-nom pour de sombres histoires de droit. Ce statut déteint d'ailleurs sur le film lui-même, pour tout dire pas très adroit et même carrément branquignol souvent. On est pas dans le grand chef-d'oeuvre inconnu, ça va de soi, mais la vision de la chose vaut le coup tout de même. La légèreté y est de mise, sûrement pour compenser les difficiles années à venir, et tant pis si le montage frôle le n'importe quoi ou si les acteurs sont franchement en roue libre (pour le pire et pour le meilleur) : on est là pour s'amuser, pour divertir, pour faire oublier le bruit des bottes, et compenser ce dernier par des joulies musiques et des petites nanas girondes, ok on prend.

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Astor (Georges Rigaud), un violoniste virtuose, parie un soir de beuverie qu'il séduira puis épousera dans les deux mois la dixième fille qui franchira la porte du Conservatoire. L'enjeu : son Stradivarius, convoité par le collectionneur Larzac (Jules Berry). Le sort tombe sur la belle et brune Hélène Vernier (Käte von Nagy et son délicieux accent), mais par tout un système de quiproquos absolument hilarants, ou tout au moins rigolos, ou assez drôles, ou plaisants quoi disons, les identités valsent et les malentendus s'accumulent façon théâtre de boulevard. Car Astor se fait engager au Conservatoire comme jeune élève et doit essuyer la méfiance et les sarcasmes de ses profs qui ne voient pas en lui le génie qu'il est. Il faudra un concert mémorable pour lever le voile sur la véritable nature des imposteurs et des virtuoses, et pour que l'amour triomphe. Bon oui, c'est pas d'une profondeur abyssale. On croise avec plaisir quelques vedettes de l'époque, Berry donc, mais aussi Bernard Blier, Josette Day, Gaston Modot, Maurice Baquet ou Raymond Aimos (en chauffeur de taxi poilant, le clou du film) ; on écoute de la belle et grande musique et on contemple les mains de ce violoniste incroyable (Zino Francescatti aux cascades) qui joue 40 notes à la seconde ; on apprécie la restitution de la vie rêvée du Conservatoire, solidaire, bruyante, collégienne, pleine d'entrain, filmée d'ailleurs dans l'énergie. Bref, c'est délicieusement désuet et démodé, parfois joliment exécuté (la scène du concert, avec ces contre-points du public, pas nouveau mais très pro), et assez court pour ne pas déclencher d'ennui.

Sans titre

On cherchera toutefois sans succès la marque de Sirk dans cette historiette oubliable. Non seulement parce que les acteurs sont très inégaux (Rigaud notamment est complètement nul), mais aussi parce que le film est curieusement bâclé par endroits : on a l'impression qu'il reste des bouts de pellicule non-coupés entre les plans, et le scénario ménage quelques suspenses qui font flop, genre : "Oh mon Dieu mais où est passé le Stradivarius ? / Non, non, il est là, c'était une blagounette". Bref tout ça n'est pas très sérieux, même si on passe un moment bienheureux en admirant la jolie photographie, l'abattage de certains acteurs de la vieille école, et l'aspect bien urbain des jeunes premières.

Searching Sirk ici

Commentaires
G
117 ans ! Quelle longévité, ce cher Patrick Brion. J'étais devant ce film dimanche soir, comme des millions de gens. Et je n'ai pas reconnu non plus mon Douglas Sirk tant aimé. Mais c'était sympathique, et votre article m'a bien amusé. On se sent moins seul.
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