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26 août 2018

LIVRE : Chien-Loup de Serge Joncour - 2018

9782081421110,0-5210026Après un livre qui m'avait semblé bien bâclé (et qui reçut le prix Interallié, comme quoi Shangols n'a aucune influence sur le monde littéraire), Joncour nous revient avec un gros opus dont il a le secret... et, je dis ça en sachant que le bougre aime bien traîner sur les blogs pour savoir ce qu'on pense de ses livres, et j'en suis désolé à l'avance, mais je me dois et je dois à nos lecteurs la vérité toute crue : celui-là est bien pire. Cet auteur depuis quelques temps semble avoir fait de l'anecdote sa spécialité : il ne raconte pratiquement rien, ou alors une petite histoire qui n'aurait jadis donné qu'un petit paragraphe dans un roman de Giono (principale référence de ce Chien-Loup), mais le fait sur 500 pages, si bien qu'au bout du compte on se retrouve avec un verre d'eau qui prend des allures de tempête. Si dans le fond, donc, on se retrouve avec pas grand-chose à grignoter, au niveau du style ce n'est guère mieux : l'écriture de Joncour tourne définitivement en rond, semble faire de la répétition inlassable du même son cheval de bataille, et frôle même parfois l'inconsistance ou l'à-peu-près. Pour justifier l'épaisseur du volume, il meuble son texte d'une poignée d'événements, répétés à l'envi, qui fige l'action et enfonce le style dans une mécanique qui nous prend un peu pour des perdreaux du jour : ok, on a compris, au bout d'un moment, que tel chien est impressionnant, que tel coin est paumé, que tel chemin est escarpé ; nous le répéter 16 fois n'ajoute pas grand chose au schmilblick.

Eté 1914 : c'est la guerre, la guerre éclate. Les hommes sont mobilisés, ils doivent partir à la guerre qui est déclarée. Dans un village paumé, isolé, désertique, seul, loin de tout, coupé du monde, isolé et désertique, les femmes doivent compenser le travail des hommes, partis à la guerre qui a été déclarée et qui les a mobilisés loin de ce village isolé et paumé. Et isolé. Elles doivent travailler à leur place, puisqu'ils sont partis à la guerre qui vient d'éclater et qui laisse ces femmes seules dans ce visage isolé, seules pour faire le travail des hommes partis à la guerre. Mais un dompteur de fauves, de lions et de tigres et de fauves, allemand de surcroît, s'installe avec ses lions (et ses tigres) dans la colline au-dessus du village isolé déserté par les hommes qui sont partis à la guerre et laissé aux femmes qui les ont remplacé pour travailler. Les superstitions et les atavismes, les croyances et les habitudes, les superstitions et les habitudes, ainsi que les croyances et les atavismes vont alors se déchaîner en cet été 1914 de mobilisation des hommes partis à la guerre, dans un village désormais laissé isolé et seul face au dompteur de fauves et de tigres, allemand, duquel on soupçonne par atavisme, par habitude et aussi par superstition atavique tous les malheurs du monde. Car en cet été 1914, la guerre éclate.

Mmmm, bon, je pense que vous avez eu un aperçu du style de Joncour dans ce livre (qu'il étale, certes, sur toute la durée du bouquin, et non sur un seul paragraphe, ce qui se remarque moins), je continuerai donc plus sobrement. En parallèle à cette tramette historique, par ailleurs laborieuse et documentée grâce au seul apport du dernier film de Xavier Beauvois (franchement, on n'apprend ni ne ressent rien de nouveau sur cette période), nous voici à l'été 2017. Un producteur de cinéma en perte de vitesse part, entraîné par sa femme, sur la fameuse colline habité jadis par notre dompteur. Il va y rencontrer un chien-loup, deux chasseurs patibulaires et le bonheur, et faire l'expérience d'une nature sauvage, inhospitalière mais qu'il va apprendre à connaître et à aimer. Il va aussi y fomenter un complot contre ses deux associés fans de Netflix qui veulent vendre son précieux catalogue de films à la chienlit capitaliste. La trame avance ainsi en allers-retours entre passé et présent, jusqu'à ce que les deux temps fusionnent, une fois les deux suspenses parallèles (qui vole les brebis du village ? et l'homme civilisé arrivera-t-il à s'unir avec la sauvagerie de la nature ?) résolus.

Si on regarde ça un peu à tête reposée, on se dit que le livre n'a pas grand chose d'autre à nous proposer que le dressage d'un gros chien. Joncour a beau essayer de nous faire son laïus sur l'animalité et la sauvagerie, sur les horreurs de la guerre et l'attente des femmes, sur la vanité des outils de communication moderne, il s'avère bien trop petit-bras au niveau de l'écriture pour parvenir à donner un sens plus profond à tout ça. Maladroit, pataud, superficiel, et même parfois mal écrit (ou écrit sans nécessité, sans plan clair), Chien-Loup apparaît très vite comme complètement inutile. On baille sous le soleil du Lot en attendant que quelque chose arrive, que ce soit un événement de la trame ou une beauté d'écriture, le début d'un regard ou même une petite phrase un peu plus fine. On en sera pour nos frais : le livre semble pris dans sa propre langueur, et l'auteur semble souvent sorti des longues siestes affectionnées par son héros. Beaucoup plus chien que loup.

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