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9 juillet 2018

Borderline (1930) de Kenneth MacPherson

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On continue de découvrir la carrière de Paul Robeson (ici au côté de sa femme Eslanda) avec cette œuvre que l'on pourrait allègrement qualifier d'avant-gardiste, l'expression n'étant point ici galvaudée et, oui, je m'en expliquerai. Même si, au départ, on patine un peu à comprendre les tenants et les aboutissants de l'histoire, celle-ci se révèle finalement plutôt simple : une black, Eslanda, a une aventure avec un certain Thorne. Il la met dehors et la chtite de retrouver,, après un petit jeu du chat et de la souris dans les ruelles de la ville, son mari, le beau et grand Paul. Bien. C'est pas fini. Suite à cette histoire d’adultère, aura lieu  une violente dispute entre Thorne et sa femme (qu'on appellera, pour des soucis de clarté, Astrid...). Jeu de main, jeu de vilain, il ne fallait pas jouer avec ce couteau puisque l'un d'eux, dans la bagarre, y perdra la vie. Qui est responsable de ce drame domestique ? Ben Paul (!!???), forcément, il est noir, et il lui sera expressément demandé de quitter les abords de cet endroit joliment champêtre mais aux habitants rustres, ceux du Lac Léman pour ne pas les citer. Une sale histoire de racisme primaire, oui, mais là n'est sans doute point l'aspect le plus marquant de l’affaire.

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Parce que MacPherson (dont il s'agit du seul long-métrage) a du style, parfaitement monsieur. Le montage est en soi trépidant, un peu déstabilisant au départ, on l'avoue, mais diaboliquement novateur. Des plans courts, sur les personnages, sur les objets qu'ils tiennent, sur leur environnement proche, des séquences qui s'enchaînent sans aucune transition (est-on toujours dans la même scène ou est-on subrepticement passé à une autre ?), c'est parfois à la limite du rythme d'un vidéo-clip (superbe accompagnement musical jazzy, il faut le signaler au passage, pour cette version restaurée), un peu haché, certes, mais définitivement culotté et original. En plus de cet aspect purement technique pourrait-on dire, se rajoute le sentiment étrange de ne pas être... au tout début des années 30. Est-ce la coiffure des personnages, leur faciès (oui, je me suis posé des tas de questions), leur façon très à la coule de jouer (notamment toutes les scènes dans le bar qui semblent toujours prises sur le vif) mais c’est une véritable gageure de dater correctement cette œuvre – faites le test chez vous auprès de quidam et revenez vers moi pour confirmation, merci (d'où mon terme d'avant-gardiste auquel je m'accroche férocement).

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On sent que MacPherson met sa patte dans chaque scène pour tenter de créer un cinéma résolument « moderne », nouveau - je parlais des scènes de bar mais il en est de même pour ces petites balades champêtres de la famille Robeson ou pour ces plans qu'on dirait "volés" sur des personnages secondaires (notamment cette grand-mère avec son sac de course et son discours de gros sac - "dehors les noirs !", on aurait presque envie de lui couper la gorge avec un poireau). Du même coup, on regarde la chose avec un vrai plaisir (la curiosité nous tuera) même si on a parfois un peu l'impression que le fil conducteur de l'histoire se délite en route - tout ne peut être parfait pour ce genre de coup d'essai. Déstabilisant, disais-je, sans doute, mais surtout constamment surprenant, à l'image de ce combat à coups de couteau qui part méchamment en vrille. Bref un film un peu "borderline", avec un message relativement simple à comprendre dans le fond mais terriblement créatif et "moderne" dans la forme. On n'en a pas fini avec le Paul - mais par contre c'est terminé, malheureusement, avec ce prometteur MacPherson dont la carrière semble avoir été tuée dans l'œuf...

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 The Criterion Collection

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