Hostiles de Scott Cooper - 2018
Scott Cooper s'améliore un brin par rapport à ses merdes précédentes, et nous offre un western sérieux comme un concile du Vatican mais plutôt bien réalisé. Il faut dire qu'il a opté pour les magnifiques paysages du Nouveau-Mexique, et que vous pouvez placer n'importe quel veau dans de tels cadres, vous obtenez quand même quelque chose. Au moins, de ce côté-là, les yeux sont servis : Cooper filme très lentement la déambulation d'un groupe d'hommes dans le désert américain, cadre subtilement le ciel, ouvre son écran au plan d'ensemble et au format large, et réussit à retrouver la forme classique de ses glorieux aînés. Une solennité, une redécouverte des paysages des origines, quelque chose comme ça... C'est la principale (la seule ?) qualité de ce beau film ample et assez "bio" : redécouvrir le plair du grand cinéma sans trucages et sans écrans verts, s'ancrer à nouveau dans un cinéma de grands paysages, contemplatif et presque métaphysique.
Il fallait bien ça pour faire passer la pilule, parce qu'à part ça, c'est du gros ratage. Même si on oublie les nombreuses scènes déjà vues mille fois ailleurs (c'est peut-être ce qu'on appelle de l'académisme, mais qui peut frémir encore, en 2018, devant ces scènes d'attaque d'Indiens et ces vieux qui défendent leurs territoires à coups de fusil ?), on sourit quand même devant le sérieux avec lequel Cooper attaque son histoire. Pas un brin de distance dans ce scénario solennel et mormonesque, dans ces personnages aux mâchoires serrées qui rigolent seulement quand on les scalpe, dans ces épisodes édifiants comme une page de Bible. Les acteurs y vont quand même un peu fort du rimmel noir et de la grimace concernée : Christian Bale a pensé que jouer un cow-boy hanté par la violence qu'il a traversée toute sa vie serait plus probant en tirant une gueule de 7 mètres de long et en grognant quelques borborygmes d'ours ; il en ressort un personnage à la limite du ridicule, à peu près incompréhensible (pourquoi donc aller crier dans le désert comme un damné dès qu'on lui file une mission ?), et au comportement psychologique illogique (gros raciste au départ, ennemi juré des Indiens, il se retrouve au bout du truc à défendre les traditions indiennes avec une abnégation sans faille). Les Indiens quant à eux, trimballent paresseusement les clichés de leur peuple, il suffit de s'intéresser à la distribution pour s'apercevoir que ces acteurs cachetonennt inlassablement dans la fonction. Mais la plus poilante reste Rosamund Pike, qui vaut le déplacement pour ses cris de dinde et son jeu de clown : elle a en charge la partie bouleversante de la trame, puisqu'elle perd mari et enfants dans la première scène, massacrés par de méchants Peaux-rouges, et elle exprime sa vive douleur par des grimaces que ne renierait pas Jim Carrey, c'est hilarant.
Mais le film n'assume absolument pas cet humour involontaire et promène sa trame pompeuse durant 2h30 très très longues, lente pérégrination très mal racontée (on a l'impression que la troupe campe tous les 200 mètres) entrecoupée ça et là de pics de violence usés jusqu'à la corde. Tout le monde a l'air d'y croire sévèrement, sauf le public qui s'endort tranquillement. Rappelons que les grands westerns de l'âge d'or duraient 80-90 minutes et ne pétaient pas plus haut que leur selle.