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Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
25 octobre 2017

Quatre de l'Infanterie (Westfront 1918 : Vier von der Infanterie) (1930) de Georg Wilhelm Pabst

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Un peu de divertissement à l'approche de Noël ? Pabst montre l'horreur de la guerre de tranchées et livre une œuvre qui ne fait pas dans la dentelle : le temps n'est plus (ou pas encore) à la propagande mais à la mise en garde (pour preuve ce "ENDE ?!" qui clôt le film sur un doute explicite...) ; la guerre non seulement c'est sale (regardez-moi ces pardessus de boches tout tachés, on dirait une tenue de maçon portugais...), mais en plus c'est une boucherie (Français et Allemands lancent des assauts à l'arrache et s'entretuent à grands coups de grenade... L'artillerie allemande, sinon, lors de temps calmes, tire parfois sur ses propres hommes, créant une certaine confusion) : au mieux on peut mourir (le repos du guerrier), au pire survivre - en ayant perdu un ou deux membres dans la bagarre ("Je n'ai plus de jambes !!!!!" / "Il te reste tes bras pour serrer ta blonde" - ach, l'humour allemand) ou en devenant complétement taré (un ersatz de Klaus Kinski pète un plomb sur un monceau de cadavres : on comprend aisément le genre de pression qu'il a subi). Pabst livre une œuvre sans concession montrant que, dans les deux camps, les pauvres soldats se voient obligés d'être les acteurs d'un carnage sans fin sans en comprendre franchement l'enjeu.

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Après quelques séquences un rien stressantes sur le front (des soldats tenant à bout de bras un toit après l'explosion d'un obus : l'oxygène se met rapidement à manquer alors que leurs collègues, sous la fusillade, tentent de les déterrer) comme à l'arrière (un soldat se rend gaiement chez lui et surprend sa femme au lit avec le petit commis du boucher... Mais enfin chéri, cela fait quand même 18 mois que tu es parti ! - les femmes et l'art de l'excuse), Pabst se lance dans une dernière ligne droite qui fait frémir. Si quelques séquences permettaient encore jusque-là de respirer (les amourettes d'un étudiant allemand avec la petite Franzosich Jacqueline (Jacqueline, Jacqueline !), le traditionnel spectacle donné au front pour remonter le moral des troupes (une chanteuse gaulée comme une flute, un clown plus pathétique qu'une chanson de Sardou), le final nous maintient la tête sous l'eau, sous la boue, pendant de longues minutes. Du gentil petit étudiant doué pour les relations interculturelles ne reste plus que la main qui émerge d'une mare boueuse et tout est à l'avenant.

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Les Français lancent une attaque (avec des chars qui ressemblent à des Clio équipées de pneus neige) et c'est à celui qui lancera la plus grosse : une pluie de grenades s'abat sur les tranchées et les hommes tombent comme des mouches, d'un côté comme de l'autre. Pabst ne cherche pas à faire virevolter sa caméra comme un vulgaire réalisateur français (très longs plans fixes sur un morceau de tranchées alors que les forces françaises avancent sous le feu teuton) et capte toute l'horreur de cette guerre en quelques minutes : on avance absurdement de tranchée en tranchée jusqu'à ce qu'on tombe définitivement et bêtement dans l'une - game over, c'est aussi simple et couillon que cela... Pour enfoncer le clou, il nous montre les pauvres gars qui n'ont pas eu la chance de mourir sur le coup ; crise de démence, regards ahuris, corps broyés, les personnes soignées dans les hôpitaux ressemblent à un plateau de chroniqueurs hanounesques : pas un qui n'ait une tare, pas un pour sortir une chose sensée ; hagards, mourants, débiles, ils ressemblent à des carpes hors de l'eau qui tentent d'articuler un dernier mot avant de mourir en silence. Certains gros plans sont véritablement édifiants à l'image du photogramme ci-dessous qui joue subtilement des effets de lumière : l'homme vient tout juste de mourir et son visage ressemble déjà à un crâne avec les orbites bouffées par les vers. Pabst livre un film fort et frontal : plus jamais ! Voilà Adolf prévenu… (à l'arrière justement, une grosse femme pleure la mort de son fils prénommé Adolf... Dommage qu'il ne s'agisse pas du même).

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