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26 septembre 2017

LIVRE : Un certain M. Piekielny de François-Henri Désérable - 2017

G00950Il y a les bons livres et les mauvais livres. Et puis il y a une troisième catégorie, celle des livres qui vous donnent envie d'inventer une machine à gifles. Si elle existait, je serais tenté d'y attacher François-Henri Désérable pendant quelques années, juste le temps qu'il apprenne qu'on ne traite pas la littérature comme s'il s'agissait du dernier Voici, qu'on est en droit aussi de la considérer comme une chose belle et précieuse qu'il importe de ne pas piétiner (ou pas comme ça), ou simplement le temps qu'il apprenne à écrire, ce qui nous laisse un bon paquet d'années d'avance. Un certain M. Piekielny est une merde, ce qui ne serait pas encore trop grave ; mais c'est en plus une merde brandie comme un manifeste insolent très fier de lui, c'est une merde qui aime en être une, c'est une merde qui va peut-être rafler le Goncourt alors qu'elle considère les livres comme des bêtises anecdotiques qu'il est de bon ton de piétiner en rigolant comme un crétin. En gros, c'est une insulte à mon bon goût, ce qui me dérange. Ce qui est pire, c'est que cette daube s'appuie sur un pur chef-d'oeuvre de la littérature, un de ceux qui vous font vous relever la nuit : La Promesse de l'Aube, de Romain Gary. Désérable a (mal) lu la chose jeune, en a été bouleversé, et se pique donc de nous faire partager sa passion. Pour ce faire, il prend comme point de départ ce Piekielny, voisin de Gary enfant, et qui aurait été déporté puis tué dans les camps ; depuis lors, Gary aurait entretenu sa mémoire en prononçant son nom à la moindre occasion, à la télé, devant De Gaulle, etc. Désérable se met donc en quête de Piekielny, bien décidé à en découdre. Quand, au bout de deux pages, il découvre que le brave homme n'a certainement pas existé, il se retrouve un peu ballot, mais il a un livre à finir, arrêtez de le déconcentrer. Le voilà donc fouillant les archives de Wikipedia, relevant des anecdotes croustillantes sur Gary (le genre de trucs superficiels déjà entendus mille fois) et les entremêlant avec des vannes le concernant, aussi passionnnantes qu'un épisode de Plus belle la vie.

C'est de la non-littérature, et le truc ne serait pas paru chez Gallimard (Gallimard...!), on aurait bien compris qu'on était là face à un nouveau Marc Lévy, en moins drôle. Désérable comble les vides de son non-sujet par des chapitres vains et creux. Ah ces pauvres déportés, quand même ça a dû être dur, y en a même il paraît ils sont morts ; Gary, le saviez-vous, a pris un pseudonyme à un moment, et il s'en est fallu de peu que Pivot ne le démasque, le gros malin ; des fois, les livres ne disent pas la vérité, incroyable ; quand j'étais petit, je voulais faire du hockey sur glace, je suis sûr que ça vous étonne beaucoup ; ah mais attendez, je ne vous ai pas présenté mes amis... Tout est de cette profondeur-là, tout est captivant à cette hauteur. A ce niveau-là, on est même plus dans l'autofiction, on est dans le remplissage à l'envi. Pas de construction, pas de fond, pas de style, des crétineries à chaque page (de mémoire : "son esprit résonnait comme une touche de piano qui n'aurait produit qu'un seul son"... oui, comme toutes les touches de piano du monde, on est d'accord, le gusse a pas dû pratiquer l'instrument depuis longtemps), juste un étalage d'incurie très fière d'elle-même. Son amour pour Gary se résume à lorgner la fenêtre de l'immeuble où il a vécu comme une fan de Britney Spears, et à rigoler de ses exploits militaires. Comble enfin : le gars est également fan de Modiano, et aimerait bien lui aussi écrire son Dora Bruder... On imagine la tête du dit devant cet essai de collégien mal dégrossi : une sorte d'insulte. Je refuse toujours de dire que la littérature est morte, que c'était mieux avant ; mais quand je lis des trucs comme Un certain M. Piekielny, j'ai juste envie de fuir sur une île déserte avec l'intégrale de Gary, celle de Modiano, et d'envoyer tout les écrivains se faire foutre. Que Désérable prenne ce texte comme une provocation en duel.

Commentaires
L
Vu et entendu l'auteur... Assisté à une "présentation" Gallimard pour les libraires. Même la lecture de leurs argumentaires était digne d'un zéro pointé. oui, Gallimard...! Mais tout l'art du lecteur est d'éviter de perdre son temps au delà de 50 pages !
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J
Tu piques ma curiosité, ami Gols. <br /> <br /> Ce Désérable (Désérable ! Mâtin, quel nom ! Me fait penser à Sylvie Vartan dans "Le Clair de lune à Maubeuge" twistant sur "Des désert! Des déserts!" Ouais, bon, on a les références qu'on peut. Mais j'adore immensément La Promesse de l'aube moi aussi) , donc ce Désérable, vu de ce pitch, paraît en effet être un parfait un Jean-Foutre. Mais c'est toujours intéressant, un Jean-Foutre, comme disait l'ami Georges à moustaches (cette dernière réf. pour équilibrer la Vartan).
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