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22 mars 2017

L'Insoumis (1964) d'Alain Cavalier

"- Oui c'est horrible, le monde est fou, je le sais maintenant.
- Et pour comble, moi, je t'aime."

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Un petit film d'Alain Cavalier censuré en son temps (ah, la guerre d'Algérie...) avec un Delon jamais aussi bon qu'en animal blessé, ça ne se refuse pas. Notre ami Alain déserte l'armée pour continuer d'œuvrer pour la cause française... mais uniquement pour récolter de la thune et pouvoir enfin retourner chez lui au Luxembourg (exactement comme l'ami B.). Delon kidnappe l'avocate Léa Massari (vous voyez le coup venir, vous avez raison...) avec le gars Robert Castel (oui, le grand Robert Castel !). Ne pouvant plus supporter l'accent pied-noir du Robert (c'est un peu plus complexe que cela mais ça reste un résumé), il le descend et décide de se faire la malle en libérant Léa et un autre prisonnier. Delon est blessé dans la bagarre avec Robert, se fait soigner mais continue de souffrir comme un âne... Il décide de regagner clandestinement la France puis le Luxembourg en passant par Lyon (la ville de la Léa) ; à l'agonie, à cause de sa blessure, il passe voir celle-ci qui l'aide et se retrouve aimantée par le regard si doux de cet homme si dur. Nos deux amants se retrouvent sur les routes de France en direction de Chalons avec les flics à leur trousse (le passé de Delon l'a rattrapé et il a dû user à nouveau de son flingue). La douleur et le danger assaillent de plus en plus notre insoumis Alain et l'on sent venir la fin tragique en bout de route...

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Delon, avec son regard de chien battu mais toujours prêt à mordre ou à dégainer quand il sent approcher le danger, est une nouvelle fois excellent, dans le rôle de ce personnage engagé presque malgré lui dans cette fuite en avant (pourrait-on faire un parallèle avec la France ? Ouh, ce serait finaud). Il ne cherche pas particulièrement à se faire remarquer, fait montre d'une certaine empathie envers une Léa prisonnière et assoiffée mais il va rapidement se retrouver dans un tourbillon de violence dont il ne pourra s'échapper. Le premier coup de feu est comme un coup à la porte de l'enfer - comme dirait l'autre - et, en décidant de ne pas tuer son boss et ancien lieutenant (le toujours solide Georges Géret), il sait parfaitement qu’il va au-devant d’ennuis (ce dernier fera forcément tout pour le retrouver). Le mal est de toute façon dans le fruit (cette blessure a l'air beaucoup plus sérieuse que prévue) et notre Alain semble condamné d'avance - le salaire de cette sale guerre en quelque sorte... La Léa est là pour lui apporter une ultime preuve d'affection, pour l'aider à aller jusqu'au bout de son destin, mais l'on sent bien que les forces du Alain risquent de s'épuiser en chemin. La tragédie est en route, disais-je et répétais-je...

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On aime ce casting irréprochable (on peut ajouter aux acteurs précités Maurice Garrel dans le rôle du mari de Léa, rêche comme un spectre), cette petite musique de Delerue qui sait se faire entendre au besoin (lors de la première "scène d'amour" entre Massari et Delon, une scène sous tension puisque des tueurs peuvent venir interrompre à tout moment les amants ; ce petit air jazzy teinté de tristesse alors que le Delon s'écroule, au bord de l'épuisement, aux portes d'un dancing...), ce soin apporté (un soin hitchcockien ? Allons, pas d'emballement) à filmer des objets (les accessoires de Léa) ou des gestes signifiants (les mains de Léa et d'Alain qui se rejoignent pour signer leur pacte), cette direction très sobre de l'Alain capable de violent coup de grisou, ou encore ce final à la fois tout en douceur et plein de tristesse qui scelle le sort d'un homme exsangue. Une oeuvre politique (en creux, forcément) parfaitement maîtrisé par Cavalier (pour son deuxième long-métrage) sur un anti-héros qui va tragiquement à la rencontre de sa propre mort, sans même être reconnu par ses enfants...  

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