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11 février 2017

La Parade (Парада / Parada) de Srđan Dragojević - 2011

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Les Serbes, de toute évidence, ont la tête à rigoler depuis que leur pays a éclaté, et on les comprend. Cependant, les tensions ne semblent pas tout à fait écartées si on en croit cette comédie sociale. Le film semble jouer sur les bons vieux a-priori du pays quant à l'homosexualité, mais va aussi chercher discrètement ses inspirations dans l'irréconcialiation entre les communautés et les pays. Du coup, on ne sait si on est face à une farce un peu superficielle et un film gentiment politique. On prend les deux, avec toutefois beaucoup de pincettes. Un carton au départ pose bien les choses : il existe des termes désobligeants différents pour désigner chacune des petites communautés ; il n'en existe qu'un pour insulter les homos : pédé.

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A partir de ce triste constat, Dragojević tresse un petit scénario assez marrant. Un petit groupe veut organiser une Gay Pride à Belgrade, après un précédent qui s'était terminé en massacre. Ils décident d'engager pour le service d'ordre un mercenaire, vétéran de la guerre, solidement amarré dans ses a-priori homophobes. D'abord très réticent, le gars va apprendre à connaître cette communauté, et va engager à ses côtés 7 complices (le film multiplie les références aux Sept Mercenaires), chacun issu d'un peuple différent, chacun ayant combattu lors de la guerre. La compréhension lente des homos va donc s'accompagner d'un portrait plus ou moins fin de chacun (Croates, Bosniaques, Kosovars), le tout se terminant dans le joyeux souk de la grande bagarre de la Gay Pride. L'homophobie latente des Serbes va dans les dernières minutes virer au pamphlet contre deux Serbies : la moderne et l'ancienne, l'humaniste et l'arriérée. Sur le fond, le film est assez fin, retournant de façon crédible les bons vieux mecs tatoués et virils dans leur regard sur la faune colorée et précieuse des gays, et poussant jusqu'à un arrière-fond politique qui marque des points. A la fin, les gars, homos et hétéros confondus, se retrouvent face au même mur : des skinheads bourrins très fiers de leurs convictions et de leurs battes de baseball. Ce n'est plus un combat de sexualités différentes, mais un combat de civilisations. Dragojević n'appuie pas là-dessus, le laisse voir plus qu'il ne le verbalise, et c'est bien.

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Par contre, sur la forme, on tique plus souvent qu'à notre tour. Les caricatures épaisses sont légion, et si on comprend que la comédie nécessite un trait un peu grossier, on ne peut s'empêcher de penser que le traitement aurait gagné à être plus fin. Les homos boivent leur whisky en levant le petit doigt, les vétérans musclés sortent les flingues à la moindre anicroche, et en voulant défendre une saine compréhension entre les deux camps, le gars use et abuse des clichés. On pense à La Cage aux Folles, à Pédale douce, et ce ne sont pas les références les plus nobles. Ajoutons que le montage est immonde, et que à vouloir faire rigoler sans scrupule, le film rate pas mal de choses (le combat des femmes, par exemple, représenté par une dinde vraiment trop schématique). Allez, reconnaissons qu'il y a deux ou trois bons gags dans ce film, et fermons les yeux sur la lourdeur du reste. Ce genre de sujets nécessite sûrement qu'on l'attaque au bulldozer, si l'on en croit les dernières images documentaires : le monde n'avance pas vite, et ce film est une petite pierre agréable posée vers des relations sociales plus saines.

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