Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
15 décembre 2016

Voir du Pays de Delphine et Muriel Coulin - 2016

thumb_1445_film_main_big

Les soeurs Coulin continuent à creuser le sillon d'un féminisme in vivo, et cette fois, à l'opposé de 17 Filles, choisissent un contexte typiquement masculin pour dynamiter la guerre des sexes. En l'occurrence un bataillon de militaires, à peine débarqué de l'Afghanistan où ils ont dû subir un épisode traumatisant, et qui a droit à quelques jours de décompression dans un hôtel 5 étoiles de Chypre. Après ces vacances, ils retourneront en France retrouver leurs familles. Parmi eux, trois filles, qui vont devoir batailler non seulement pour mettre à jour la vérité du guet-apens qui les a traumatisés, mais aussi pour faire leur place au sein des hormones mâles, qu'elles soient chypriotes ou françaises. Belle volonté, plus mûre, de la part des cinéastes, et beaux repérages : au sein du paradis que sont l'île et son hôtel, se déroule sous la surface, dans le subconscient de ces jeunes gens, un enfer. On fait le point dans des débriefings en images de synthèse très éprouvants, puis on se lâche au Macumba, le mélange est explosif, les tensions longtemps bridées vont exploser sous le soleil, et nos demoiselles vont avoir du fil à retordre.

394626

Notons d'abord l'interprétation incandescente et intelligente des acteurs, qu'ils soient mâles ou femelles. Soko et Ariane Labed sont parfaites, très crédibles dans leurs pulsions gamines autant que dans leurs coups de gueule contre les mecs. Et ceux-ci sont loin d'être pris en masse, comme il aurait été facile de le faire : les cinéastes isolent 5 ou 6 cas, les densifiant, les fragilisant assez finement. Ce n'est malheureusement qu'à moitié que le film convainc. Dans sa partie "militaire", dans son enquête pas passionnante sur les arcanes de cette attaque meurtrière sur le terrain, les Coulin ratent l'occasion de faire un portrait de cette jeunesse qui veut "voir du pays" et choisit l'Afghanistan pour cela. Elles auraient pu réaliser un beau film sur la perte de l'innocence, mais l'angle est mauvais : le choix de ces reconstitutions en images de synthèse, on le comprend, et on voit même combien cette option vient questionner le pouvoir mensonger du cinéma ; mais elles font passer en avant la description de ces femmes au sein du bataillon, et cette partie-là du film est sacrifiée. On s'en fout de savoir qui a trahi qui, qui est un héros et qui un traître, et la moitié du film est ainsi peu intéressante. Filmer un traumatisme sous le soleil était un beau pari ; il est raté. Plus attachante est la partie vraiment psychologique du film, cette description minutieuse des rapports entre militaires, et surtout ceux entre hommes et femmes. C'est lors d'une escapade loin du batailllon (autre façon de voir du pays) que nos demoiselles vont pouvoir assister au pouvoir masculin en plein. Sans insister, sans faire un drame insoutenable, les Coulin pointent du doigt les jalousies et les inégalités ; et ces demoiselles, même farouchement grandes gueules, même émancipées, resteront sur le bord de la route. En partant à l'autre bout du monde, ces jeunes gens ont quitté leurs repères et leurs valeurs, ils en reviennent déchirés et la réparation sera longue. Le film sait montrer ça, c'est bien. Un film un peu raté, un peu banal, mais qu'on aime bien quand même pour ce qu'il dit discrètement.

maxresdefault

Diaphana est l'éditeur de ce film délicieux qui sortira le 10 janvier. Vous trouverez son site ici.
C'est le décidément nécessaire site Cinétrafic qui nous a accordé le droit de voir ce film en avance.
Les autres productions made in France sont là.

Quant aux autres films (qu'il faut, selon leurs termes, regarder absolument) : allez-y donc.

Commentaires
Derniers commentaires