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7 novembre 2016

La Sentinelle (1992) d'Arnaud Desplechin

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Intrigante oeuvre post guerre froide avec un Desplechin qui met en scène d'éternelles histoires de filles et de garçons en milieu parisien privilégié (amicalement, amoureusement, familialement) et qui parvient, parallèlement, à évoquer les nouveaux enjeux de ce monde - où les stratégies de notre petit territoire occidental ne sont guère plus brillantes, plus enviables, plus louables... Soit donc l'ami Salinger qui lors d'un voyage d'Allemagne en France se retrouve avec une tête dans ses malles. Etonnement et consternation chez notre médecin en herbe... Par le biais de ses relations (lui-même étant fils de diplomate), il découvre qu'un homme, ancien agent franco-russe, a surement tenté par ce biais de lui transmettre un message... Ce dernier, qu'il finit par rencontrer, lui demande de déterminer l'identité de cette fameuse tête... Salinger se met minutieusement à la tâche pour découvrir tous les secrets qui se cachent derrière l'identité de cet homme et les raisons de sa mort. La petite comédie des sentiments se transforme en pure thriller en milieu feutré et secret.

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On aime chez Desplechin cette facilité à camper toute cette petite troupe de jeunes personnages ambitieux (Thibault de Montalembert, Bruno Todeschini... et une apparition fugace de Mathieu Amalric, douze ans), des personnages un peu puants dans leur posture boboïssime mais parfaitement crédibles en jeune diplomate ou agent des services secrets. Les figures féminines qui viennent en renfort et encadrer notre personnage principal (Marianne Denicourt en soeurette, Emmanuelle Devos en éventuelle amoureuse, Valérie Dréville en amie...) sont tout autant superbement dirigées (Devos, hein, quelle merveille cette actrice) et donnent du poids, du réalisme à ce récit qui flirte habilement entre récit fantastique (au moins au départ) et politique. On se régale de la complicité entre Salinger et Denicourt (belle et charismatique comme une Romy Schneider - Gols fait un arrêt cardiaque devant la comparaison) comme du jeu de drague entre Salinger et Devos (regarde mon doigt, tu vois mon doigts ? Pardon, c'est ma faute, je suis désolée de t'allumer - magnifique). Salinger, lui, à mesure que le film avance, devient de plus en plus livide, devant se méfier à la fois de ce personnage ultra-inquisiteur et dominant interprété par Todeschini et ayant bien du mal à savoir comment naviguer dans ses eaux troubles (qui manipule qui ? Est-il le dindon de la farce ou incarne-t-il l'ultime sentinelle d'un monde nouveau qui a oublié ses valeurs ?). Plus de deux heures durant, on est comme lui sur le qui-vive, impatient de voir où tout cela le mène.

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Desplechin prend tout son temps pour nous montrer la rigueur dont fait preuve Salinger : fragment par fragment il étudie ce crâne pour déterminer son identité ; mais ce travail purement scientifique se double d'une recherche spirituelle... notre médecin légiste essaie également de s'intéresser à la confession religieuse de son quidam pour savoir comment "l'inhumer" (du moins ce qu'il en reste) dans les règles. Salinger, en mêlant cet aspect méticuleux et "consciencieux" (jeu de mot), en s'intéressant à la vie des morts (bel écho à son précédent film) le plus scrupuleusement possible, est celui qui se porte garant d'une certaine morale humaniste dans cette nouvelle ère qui part indéniablement sur de mauvaises bases (on reprend les recettes d'antan : espionnite, manipulation, réglement de compte funeste...). Malicieux premier long métrage de l'ami Desplechin qui mêle avec art affect et intellect - sa patte, son savoir-faire.     

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