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Shangols
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9 octobre 2016

Du Soleil dans les Yeux (Il Sole negli Occhi) (1953) d'Antonio Pietrangeli

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Ce premier film du cinéaste italien Pietrangeli a définitivement quelque chose de touchant, à l'image de son actrice principale Irène Galter - ce rôle lui va comme des (vieux) collants. Le pitch est relativement simple : une jeune femme, Celestina, quitte son village natal pour venir gratter quelques sous à Rome. Notre jeune broussarde est forcément un peu perdue dans cette grande ville (elle se perd dès les premiers instants - j'ai lu dans son regard quelque chose que je ne connais que trop : "oups, me suis encore perdu en quelques pas"...), s'habille de façon guère vintage (sa patronne lui prête une vieille paire de chaussures à talons et notre pauvre Celestina de partir en ville avec la même grâce que si elle portait des après-ski), gaffe (et vogue de taff en taff) et s'éprend du premier gazier gentillet un peu entreprenant (un solide plombier interprété par Gabriele Ferzetti). On sent que la fébrile Celestina commence peu à peu à "prendre de l'étoffe" (sa transformation physique au fil des semaines est évidente : la petite paysanne engoncée dans son vieux manteau en velours se féminise), prend de plus en plus d'initiatives au cours de son passionnant travail (endormir le gamin au gaz, acheter de la viande avec ses propres deniers pour ne pas mourir de faim chez un vieux professeur qui se nourrit de livres, péter les robinets pour faire venir le plombier...) et se voit le plus souvent remerciée ; pas grave, elle est sur la route de l'émancipation - pense-t-on...

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Pense-t-on et on pense mal car la pauvre, même si elle prend de moins en moins dramatiquement ses renvois (elle est de toute façon payée des clopinettes), prend un risque en voulant mettre toutes ses billes, tous ses espoirs en ce galant plombier. La belle Celestina avait l'opportunité de se voir offrir un terrain par de vieux patrons et de se marier avec un moustachu gringalet mais elle décide, en balardant violemment le gazier et ses mains baladeuses, de suivre son propre instinct : à défaut de pouvoir rêver d'ascension sociale, notre séduisante femme de ménage pourra toujours suivre son amoureux et sortir de sa petite vie mesquine... Il faut voir le sourire rayonnant de l'Irène lorsqu'elle monte sur le porte bagage de son homme qui l'emmène en moto le temps d'un week-end. S'il ne tombe pas raide dingue amoureux d'elle c'est qu'il est aveugle. Notre plombier n'est heureusement pas aveugle (il craque indéniablement pour elle) mais beaucoup plus "réaliste" et arriviste que sa douce : lorsque son associé au taff lui propose d'épouser sa sœur, il semblerait bien que notre plombier soit plus apte à faire un mariage de "raison" que de coeur... On pensait se diriger vers une jolie petite œuvre sociale et sentimentale sanctionnée par un happy end... Malgré un épisode sur la toute fin des plus borzagiens (l'incontournable scène dans un hôpital avec le plombier au chevet de sa belle, blessée dans sa chaire et dans son âme), il va nous falloir nous rendre à l'évidence : les fifties en Italie ne sont pas encore vraiment propices à l'égalité des sexes... Outre les multiples brimades que notre Celestina doit subir au boulot, sa condition sociale originale et son sexe ne lui permettront aucunement de pouvoir espérer la réalisation du moindre de ses désirs. On est du coup tout tristoune pour notre Irène, dont le regard semble s'être à tout jamais éteint... Malgré tout, ses comparses de boulot gardent une certaine foi en leur capacité à aller de l'avant et l'on peut espérer assister au début d'un combat... Une première oeuvre rondement menée par Pietrangeli dans la forme et qui laisse dans le fond un goût amer - même si la dernière image présente un groupe de femme "en marche"... A voir, forcément, et ça tombe bien puisqu'il ressort sur les écrans français cette semaine (on est à la pointe de l'actu sur Shangols, eh oui...)

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