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29 mars 2016

Le Bouton de Nacre (El botón de nácar) (2015) de Patricio Guzmán

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Guzmán nous plonge une nouvelle fois dans l'histoire tragique du Chili, traçant de subtiles parallèles entre l'histoire d'hier et celle, plus récente et tout aussi barbare, de la dictature. Il nous conte le récit de ces premiers habitants, ce peuple de nomades des mers composé de cinq différentes ethnies. Avec cet art de lier l'infiniment grand (les océans, le cosmos...) et l'infiniment petit (l'histoire de ses êtres dont les dessins qu'ils se peignaient sur le corps ressemblaient à des constellations, l'histoire de cet être acheté pour quelques boutons de nacre à sa famille et ramené en Europe), le cinéaste nous fait une nouvelle fois magnifiquement et tragiquement voyager dans le temps et dans l'espace. Le plus horrible étant sans doute cette véritable "chasse aux indiens" pour quelques kopecks, ce massacre planifié pour permettre au gouvernement d'obtenir des terres. Le plus magique étant sans doute, l'histoire de cette femme, l'une des vingt dernières descendantes de ces peuples des origines, qui raconte dans sa langue son voyage de plus de mille kilomètres en canoë le long des côtes chiliennes - un récit intelligemment repris lors du générique de fin comme pour faire entendre une dernière fois ces voix qui s'éteignent. Il sera donc aussi question, dans la dernière partie, des tueries orchestrées lors de la (courte) ère post-Allende, et de ces corps, attachés à des rails de chemin de fer, jetés dans la mer. Plus de mille personnes furent balancées d'hélicoptère pour tenter de dissimuler au fond des océans cet horrible secret d'extermination moderne.

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De la mort d'un peuple de l'eau à la mort d'un peuple dans l'eau, la boucle est bouclée pour évoquer ces êtres sacrifiés, étranglés, massacrés, effacés. Il est des parallèles ou des comparaisons dont on se passerait bien : ainsi ce peuple des origines qui se coiffait de cagoule et ces individus pro-Allende jetés dans l'eau avec un sac à patate sur la tête ; ainsi ces scories marines que l'on retrouve sur ces rails retrouvés au fond des océans, les corps s'étant dissous, mais ces scories prenant bizarrement l'allure de mini-crâne comme une trace ultime de ces êtres humains ; ainsi ce bouton retrouvé serti dans un rail retiré de l'eau : d'un bouton l'autre, du symbole d'un massacre à un autre. Guzmán, dont la voix off se veut posée à défaut d'être apaisante, livre une nouvelle fois au passage de magnifiques images de la Patagonie, comme un hommage à la poésie de cette nature, comme un hommage à la poésie de la nature humaine, quand elle vit en harmonie avec son environnement, quand elle vit en harmonie avec ses idées de liberté. Un nouveau documentaire intelligemment conçu et magnifiquement illustré par le gars Patricio qui n'en finit pas d'évoquer les horreurs de cette bande de terre qu'est le Chili, de cette bande d'assassins que furent certains chiliens.  

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