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16 mars 2016

LIVRE : Candide et Lubrique (Lurid & Cute) d'Adam Thirlwell - 2015

9782823608144,0-3013328Roman inclassable et difficilement cernable que ce Candide et Lubrique, qui raconte on ne sait trop quoi on ne sait trop comment mais finit par instiller un charme assez troublant. A priori il s'agit du discours d'un homme normal : marié et amoureux de sa femme, franchement loser, vivant encore chez ses parents, brillant nulle part, il est l'homme sans qualité d'aujourd'hui. mais quand le roman commence, il est au lit avec une autre femme, qui plus est couverte de sang, situation de thriller loin de ce petit caractère commun. Le livre ne cessera jamais de naviguer entre ces deux eaux : d'un côté, les réactions banales d'un homme banal, de l'autrre une vie qui a toujours quelques mètres d'avance sur lui, et qui ne cesse de l'étonner : sur les conseils de son pote, il va tour à tour être engagé dans une orgie, puis dans une série de braquages "pour rire" qui l'amèneront un peu trop loin. A chaque nouvelle aventure, essaimée à petites doses tout au long de ce long roman, le gars tente d'épuiser par le verbe le sujet, de comprendre à tout prix pourquoi lui, mec normal, est entraîné là-dedans, ce qui fait que LA vie est plus forte que SA vie.

Comme son personnage, on n'arrête jamais d'être surpris, secoué, brinquebalé par ce roman. D'abord à cause de la densité de son style : c'est touffu comme dans une forêt, il y a à boire et à manger dans ce monologue qui a tout d'une logorrhée sans frein. L'écriture, brillante, dandy, raffinée, typiquement anglaise jusqu'à son humour non-sensique, vous entraîne façon tourbillon jusqu'à des contrées qu'on n'attendait pas. Thirlwell accepte les longueurs, les tunnels, parce que la névrose de son personnage se situe justement dans cet excès de langue, dans ce trop-plein de mot, dans ces débordements irrésistibles de langage. Du coup, on fatigue parfois, on sature devant ces immenses paragraphes essouflés, à la ponctuation rare, qui ne cessent jamais de la première à la dernière page. Mais les évènements eux-mêmes sont pour beaucoup dans la surprise du livre : tout arrive comme tombé de nulle part, sans motivation réelle ; ça pourrait devenir du coup fourre-tout et facile, mais curieusement le texte est très homogène, suit une vraie logique. Malgré l'irrationnalité de ce qui se passe, et du personnage lui-même, on croit à cette existence, et on assiste ébahi à cette vie qui déborde, qui surprend et qui tourmente le héros. Il est vrai que sous cette avalanche de mots, on a du mal à percevoir où Thirlwell veut en venir, de quoi il veut parler : des nouveaux couples, qui peuvent s'aimer même en se trompant ? de l'échec du langage ? des nouvelles forme du discours ? En tout cas, son bouquin se lit avec plaisir, un peu interrogatif mais satisfait.

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