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10 décembre 2015

LIVRE : Cahier de l'Herne No 112 : Henri-Pierre Roché - 2015

CAHIER+Roché+couverture+bandeau-1(1)

Gloire à Dieu au plus haut, l'Herne vient de sanctifier Roché, j'aurais vu cela de mon vivant... Alors oui, je vous vois, la bouche un peu en cul-de-poule, me dire, Roché ? Roché ?... Bah, je ne vous en veux point, vous n'êtes pas tombés dedans quand vous étiez petits. Roché, c'est Jules et Jim, Deux Anglaises et le Continent et... Oui, bon, c'est un peu court au niveau de l'oeuvre romanesque, c'est ce qui arrive quand on commence d'écrire au seuil de la mort. Je pourrais certes faire le malin en évoquant son recueil sur Don Juan, son roman inachevé sur Duchamp, ses carnets qui couvrent son existence sur une cinquantaine d'années, ses nouvelles (dont certaines, jusqu'alors inédites, viennent d'être évoquées par Gols, lui, l'annonciateur béni de ces parutions sur lesquelles je me suis jeté corps et âme), ses écrits sur l'Art, ses traductions de poèmes chinois - non, non, je n'en fais pas un peu trop, lisez-moi ça par exemple : 

La lune pâle brillant au ciel

Le ruisseau touché par la brise

Donnent des joies pures et parfaites

- Mais peu de gens le savent.

Oui, Roché est un touche-à-tout (découvreur d'artistes, traducteur, collectionneur d'art, écrivain...) qui aurait pu être réduit à rien, oups, si Truffaut n'avait pas adapté son oeuvre et évoqué ses carnets (l'influence de Roché sur Truffaut ne se limite pas, d'ailleurs, à ces deux romans : les carnets et la philosophie même de Roché eurent une influence durable sur l'oeuvre truffaldienne - l'excellent article de Robert Stam L'Homme qui aimait les femmes traduit dans ce Cahier le rappelle joliment). Sur Roché, soyons franc et honnête, je fis mon mémoire de maîtrise (disponible éventuellement sous une tonne de poussière clermontoise sur une étagère dans un rebut - j'ai perdu mon propre exemplaire, me semble-t-il) et lus à l'époque tout ce qui était disponible - j'entrevis même la possibilité (en 95) de partir à Austin au Texas où se trouve, curieusement, tout le fonds Roché... Je préférai finalement me perdre dans les terres malgaches mais ma foi en l'homme et en son oeuvre ne faiblit point... C'est d'ailleurs un peu le point commun de toutes les personnes passionnées qui collaborent à cet ouvrage : on sent ce besoin de s'intéresser de manière quasi-exhaustive à tout ce qui touche à Roché (qu'il s'agisse, pour n'en citer que deux, de l'universitaire Catherine du Toit ou de l'écrivaine Marie Desplechin - difficile de ne pas être touché (et de ne pas se reconnaître...) par l'article de cette dernière intitulée L'Ecriture sait attendre). Qu'est-ce que l'Herne, sinon, nous apprend quand on pensait (presque) tout savoir ? Eh bien plein de choses, sur la vie de Roché - grâce notamment à l'évocation de pages de ses carnets restées inédites - (sa vie pendant la guerre (the 1st one) et son voyage en Amérique, sa vie pendant la guerre (the 2nd one) et ses années "d'enseignant" à Beauvallon), sur son travail avec les musiciens, sur ses oeuvres inédites, sur sa correspondance avec Gide, Gertrude Stein, Truffaut...

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Bref, une mine, même lorsqu'on se targuait de connaître le gars sur le bout des doigts. Si l'on sent, dans ces différents articles de "fans", le besoin de "réhabiliter" l'homme au niveau du style (petit clin d'oeil à l'ami Gols et à sa chronique : Picasso disait de l'écriture de Roché que c'était un "Cocteau-paysan"... je suis (petite fierté ? sûrement... ou mauvaise mémoire), un peu déçu justement par les analyses proprement stylistiques sur Roché... on tourne toujours autour du concept de "minimalisme", on parle de processus visant à l'épuration, sans jamais se pencher en profondeur sur sa syntaxe, si particulière), il faut reconnaître également quelques avis critiques un peu "acerbes" sur l'homme et son "rôle" dans les milieux artistiques de cette première partie du XXème siècle : je passe rapidement sur Gide (que Roché admirait, ce n'était pas forcément réciproque) et sur Stein (Roché a le malheur de lui donner son avis sur son style - il se prend une volée de bois vert en retour, genre t'es qui, toi ?) pour m'arrêter deux minutes sur sa "lâcheté" (l'écriture de Jules et Jim ou l'heure du rachat : son abandon de Franz Hessel (Jules) qui fut transféré au camps des Milles et ses multiples "trahisons" vis-à-vis de Helen Hessel (Kathe) disparaissent un brin derrière "l'hommage" qu'il leur rend) ou sa place comme "conseiller" de collectionneurs d'art (son plus grand titre de gloire au-delà de ses deux romans) : oui, il fut proche de Duchamp, de Marie Laurencin, voire de Picasso, conseilla John Quinn ou le Rajah d'Indore mais on ne peut pas dire véritablement que sans lui le monde artistique parisien se serait arrêté de tourner - ce fut un témoin d'une époque, un tantinet privilégié, mais sans plus... Mais basta, Roché reste génial : quand on est fan... Les photos, pour revenir à ma joie de lire la chose, sont également souvent inédites et proprement fabuleuses : on feuillette chaque page en s'attendant de découvrir un trésor. En un mot comme en trois, que du bonheur, merci l'Herne d'avoir exaucé mes prières. Je prends 10% sur chaque commande (me suis également toujours pris pour un "intermédiaire", laissez-faire...) - et la fête n'est pas finie : outre les 6 nouvelles de Roché qui viennent de paraître à part, j'ai appris, au cours de la lecture de cette parution de l'Herne, l'existence d'un ouvrage sur Helen Hessel (l'inspiratrice du personnage joué par Jeanne Moreau dans Jules et Jim), un roman sous forte influence julesetjimesque écrit par Robert Bober, un proche de Truffaut... De futures lectures dont je vous reparlerai forcément. Roché Ferrero ? Non, Roché fait rêver.

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Commentaires
S
Alors là, tout l'honneur est pour moi(t). Merci encore pour cet ouvrage auquel vous avez grandement contribué... Et sachez que les adorateurs de Roché sont plus nombreux que l'on ne croit... mais il se cache (bien).
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C
Merci de votre exubérance! Et quel plaisir de se sentir moins seule... Catherine du Toit
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