Love (2015) de Gaspar Noé
On a tous besoin d'amour en ce moment, me disais-je, en me tentant une nouvelle fois un Gaspar. La première chose qui vient à l'esprit, c'est que ce n'est pas le genre de film à aller voir avec sa grand-mère. Même si elle insiste en pensant que ce type est lié à l'arche, n'essayez même pas, cela mettrait tout le monde mal à l'aise - voir une bite éjaculer en 3D à côté de mère-grand, hein, oui, le trouble, rapidement… La deuxième chose, c'est que cette histoire d'amour et de sperme (définition que ne renieraient point le héros cinéaste du film et le Gaspar himself) est bien bien sage : des corps sculptés qui s'emboîtent, des tête-à-queue, un dérapage (l'éjaculation vue en caméra embarquée dans un vagin, c'est too much... Noé a toujours du mal à savoir où commence le mauvais goût), un peu de sperme répandu... bon tout cela n'est point choquant, cela venant simplement illustrer cette fusion érotico-amoureuse de deux amants. Why not. La troisième chose, c'est que le scénar tient sur une capote : Murphy et Electra s'aiment ; un plan à trois avec une ptite blonde (un fantasme d'Electra) , une tromperie ensuite entre Murphy et la "pièce blonde rapportée", un préservatif qui lâche, la blonde est pregnant, Murphy et Electra se déchirent (à leur tour, si j’ose dire), Murphy s'emmerde auprès de sa Blonde. On comprend cela en un quart d'heure. Suivront pourtant deux longues heures où Noé se plaira à remonter (le gars aime les films montés à l'envers, c'est un peu son péché mignon) la petite mécanique cassée de cet amour total entre Murphy et Electra, les parties entre les draps, surtout, et les petits écarts. Voilà, voilà, voilà... On comprend bien le concept mais on reste aussi sceptique devant le niveau des dialogues (les héros de Noé doivent avoir 50 mots de vocabulaire : ils semblent s’être échappés d'un film de Besson) que devant le concept... Tant de sperme pour ça, aurait dit Lelouch en pensant citer Shakespeare.
Noé est un gars qui derrière ce petit côté frontal (indéniablement, il y a des plans de bites comme jamais... pour un film non porno, et je ne sais pas de quoi je parle) fait une œuvre banale. Un peu à l'image de ces plans (son héros passant constamment dans des portes, son couple passant et repassant sous ce pont de fer) où le cinéaste privilégie le cadre dans le cadre, on se sent à l'étroit dans ce petit univers noesque : du cul, ouais, de la pipe même tiens, de la branlette, pour sûr, mais tout cela dans un univers ultra étriqué (sans jeu de mots) avec un fond plat comme une limande. L'amour perdu est une souffrance, ok, on a bien le pitch en tête... Mais cette longue démonstration de 145 minutes est-elle vraiment utile ? En un quart d'heure, disais-je, on a compris tous les tenants et les aboutissants de la chose... Ensuite, sur deux heures, absolument rien de neuf aussi bien sur le plan visuel que sur le fond (une "psychologie" de bas étage à l'image de ce bien joli gode à emporter dans son étui plastique : surfaite...). On sent que Noé en a sous la pédale mais qu'il se laisse bêtement dériver au niveau de l'écriture : comme s'il était persuadé que tout ce qu'il écrivait, tout ce qu'il filmait, était de l'or... Un Love bien trop vain.