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6 octobre 2015

My little Princess (2011) d'Eva Ionesco

"Ah non, souris pas ! Les sourires, c'est con, c'est pour les mariages"

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Sur un sujet on ne peut plus scabreux et casse-gueule (une mère faisant des photos "érotiques" pour ne pas dire porno de sa fille de 12 ans), Eva Ionesco (from a true story... her own) réalise un film qui, à défaut d'innover vraiment sur la forme (même s'il y a une belle fluidité dans certains mouvements de caméra), atteint une certaine "justesse" sur le fond. Sans tomber dans un vulgaire voyeurisme mais sans esquiver automatiquement le sujet (on suit les séances de pose durant lesquelles la mère dirige la fille et l'habille progressivement d'un fil), Eva Ionesco remonte à la source du scandale ; si ces photos défrayèrent la chronique en leur temps, ces séances ne sont là qu'en toile de fond : il s'agit surtout pour l'Eva d'évoquer les relations pour le moins "spéciales" avec sa mère. Si celle-ci fut le fruit du viol de sa mère par son grand-père (Zola peut aller se rhabiller) et semble avoir depuis un léger ressentiment envers les hommes (on peut l'entendre), elle est à la maternité ce que Chantal Akermann fut aux films d'action : c'est pas vraiment son truc. Vénale, opportuniste, sans foi ni loi (c'est le moins qu'on puisse dire, cela reste un doux euphémisme) cette mère, au nom d'une prétendue recherche artistique, prend sa fille sous toutes les coutures. Tant d'irresponsabilité dépasse souvent l'entendement. Elle présente à sa fille ses séances comme un jeu mais elle semble bien la seule à en tirer un quelconque plaisir... Si la chtite, facilement manipulable, suit les directives de sa mère, elle ne va point tarder, fort heureusement, à se rebeller.

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Le film repose sur les épaules d'Isabelle Huppert : c'est véritablement elle qui lui donne son "équilibre". Jamais meilleure que lorsqu'elle incarne des personnages ignobles, Huppert campe son personnage avec un brio monstrueux. Elle donne à cette mère à la fois un aplomb et une candeur qui, plus d'une fois, sidère. Elle se lance également dans des dialogues d'une vulgarité absolue avec un naturel qui ferait froid dans le dos s'il ne flirtait pas, par excès, avec une certaine drôlerie. Le face-à-face entre Huppert, toute vêtue de cuir et couverte de chaines, et l'assistante sociale plutôt mémère vaut son pesant de poilade. Cette mère est tellement dans son monde, tellement aveugle à toute morale qu'elle semble imperméable à toute critique... Lorsque la fille commence à sentir que sa mère l'exploite et qu'elle risque, psychologiquement (pas facile de fréquenter le collège quand une partie de tes petites camarades te traite de pute), de finir en lambeaux (à l'image de sa tenue dans le dernier plan du film), elle décide de prendre la fuite, de couper le cordon. Mais la mère s'accroche, redoutant de perdre sa poulette aux oeufs d'or. Le film pourrait aisément tomber dans le pathos sordide, voire dans le glauque : grâce au jeu d'Huppert qui fait, de la mère, un monstre presque burlesque (un monstre qui ne sait pas qu'il est un monstre peut toujours jouer les parfaits innocents), cette oeuvre, qui marche sur des oeufs, ne finit point en vulgaire recette pour voyeuristes cradingues. Il fallait du flair à l'Eva pour détecter en l'Huppert cette mère cauchemardesque... et pleine d'un naïveté affreusement bluffante. Un tact dans le jeu qui permet à l'oeuvre d'échapper aux tics du graveleux. Un pari risqué, transcendé par Isabelle H.  

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