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27 septembre 2015

The Look of Silence (Senyap) (2015) de Joshua Oppenheimer

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Après le saisissant The Act of Killing, Joshua Oppenheimer, accompagné d'un jeune homme qui a perdu son frère lors du massacre des "communistes" (avec les guillemets d'usage vu les affreux amalgames lors de ces massacres) en Indonésie in the mid 60's, revient sur les exactions de certains responsables de l'époque. Difficile, une nouvelle fois, de ne pas rester hébété devant la plupart des témoignages de ses assassins dont l'absolue mauvaise foi ferait passé celle de Gols pour de la tapenade. Pourquoi rouvrir les plaies du passé ("Et d'abord tu habites où, petit, hein ?" lancent certains tueurs - les tensions 50 ans plus tard reste vives, d'ailleurs tous les Indonésiens qui ont participé au film sont cité comme "anonyme" dans le générique de fin), pourquoi assumer une part de responsabilité quand on ne faisait que suivre que les directives du gouvernement ("Les Américains devraient également nous offrir une croisière jusqu'aux States pour nous remercier"... (sic)), pourquoi plaindre ces individus, les "communistes" étant non seulement athées mais baisant les femmes à tout va... Bref, le jeune frère laisse parler les bourreaux et finit le plus souvent par rester le regard droit, muet, devant l'absence total de tout regret, de tout pardon de ces hommes froid comme la lame de leur machette. On monte à chaque fois d'un cran dans l'échelle de l'horreur, de la connerie humaine : les deux guignols qui prennent plaisir à rejouer la façon dont ils ont massacré chaque homme (coup de machette sur la nuque, éventrement, émasculation... - ils se font prendre d'ailleurs en photo sur les lieux même du massacre (The Snake River) et l'un d'eux ose faire le signe de la victoire (cela dépasse définitivement l'entendement)), les deux vieillards qui reconnaissent qu'ils buvaient le sang de leur victime car cela leur permettait de ne pas devenir fou (bien sûr…), les deux jeunes gens qui se mettent en colère lorsque l'on parle des actes barbares de leur père (tout fier d'avoir écrit un livre sur ses crimes, un livre qu'il se vante d’ailleurs d'avoir illustré lui-même) comme s'il valait mieux enterrer cette période avec les victimes.

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Le jeune homme, lorsqu'il rencontre ces anciens meurtriers, leur fait suivre un examen de la vue : la métaphore peut sembler un peu grossière mais elle convient finalement à la perfection à la situation ; même lorsqu'on tente de les aider à ouvrir les yeux sur leurs actes sanguinaires, nos gaziers ont bien du mal à ne pas rester aveugles quant à leur crime... Il n'est pas bon d'évoquer ce temps reculé, il n'est pas bon de parler de politique, il n'est pas bon de condamner des hommes qui n'ont fait qu'obéir "spontanément" aux ordres, bref il n'est pas bon de… et tu commences à me faire chier avec tes questions un brin tendancieuses. Les parents ou les proches de victimes continuent de côtoyer au sein d'un même village les bourreaux de leurs enfants ou d'un de leur parents et le degré d'impunité de ces personnes, dont beaucoup semblent être devenus des notables, fait froid dans le dos. Après les massacres de ces années-là, le silence actuel sur ces actes semble tuer les victimes une seconde fois. On reste souvent aussi pétrifié que le jeune homme qui conduit l'interview face à ces monstres (tueur, gardiens...) qui assument leur comportement sans ressentir un soupçon de mauvaise conscience. L'Histoire est affreuse, surtout lorsque, les yeux grand ouverts, on se refuse encore et toujours de la regarder en face. Oppenheimer continue son devoir de mémoire dans un style de plus en plus sobre qui lui indéniablement fait honneur.

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