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23 août 2015

Thé et Sympathie (Tea and Sympathy) (1956) de Vincente Minnelli

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Minnelli et l’ami Douglas Sirk sont définitivement les plus grands pour traiter des sentiments, de l'affection, de la tendresse, pour jouer sur la corde délicate de la sensibilité ; certains pourraient ajouter qu’ils sont les chantres de cette notion appelée « amour » mais le terme paraît trop galvaudé, pas assez fin pour décrire l'univers cinématographique de ces deux artistes d'exception. L'autre point commun entre les deux cinéastes résiderait dans la maîtrise des couleurs : Tea and Sympathy est une merveille dans sa capacité à mêler le bleu (les sentiments à lui, J. Kerr) et le jaune-orangé (les sentiments à elle, D. Kerr) (ouvrons au passage une parenthèse pour saluer une énième fois le travail de John Alton à la photo et pour souligner la présence de ces deux Kerr au générique qui n'ont rien a priori en commun (pas plus d’ailleurs qu’au niveau de la parenté) et qui se trouvent en parfaite adéquation (ce sont des white & des Kerr, forcément)...

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De quoi est-il réellement question dans ce film de Minnelli ? Deux âmes en peine (elle, mariée à un prof, le mâle par excellence, avec un lourd accent circonflexe ; lui, jeune étudiant à l'écart des siens qui se voit affubler du surnom de "sister boy" - tout est dit) se retrouvent sur ce terrain si mouvant de la sensibilité ; il y a entre eux une évidente différence d'âge, de statut, d'expérience mais, comme deux couleurs qui se marient pour en faire une troisième, leurs pigments sentimentaux semblent identiques. Lui, John, a perdu sa mère très jeune et son père, un brin gentillet, n'a guère comblé le vide ; élevé par une maid, il est plus dans l'esprit couture que dans l'esprit sportif. Elle, Deborah, est une femme aimante qui se sent de plus en plus délaissée par ce  mari qui aime à jouer les forts-à-bras, les bons vieux leaders bourrins de jeunes garçons lors de jeux de plages ou d’excursions en montagne. Bref, entre elle, Deborah, protectrice et sensible, et lui, John, puceau et sensible, des affinités électives ne peuvent que voir le jour. Elles le verront.

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Parce que c’était lui, parce que c’était elle. Côté mâles, sur un campus ricain, il faut faire partie de l’esprit de meute : en gros être sportif (plus lutteur qu’être de la raquette) et avoir de la testostérone (parler de filles quitte à mentir sur ses prouesses de dragueur). Peu glorieux. Côté femelles, Deborah n’a guère d’équivalent : principalement des femmes BCBG dont l’activité intellectuelle principale se joue entre les terrains de golf et la plage. Il y a sinon une pétasse de bar qui aime à déniaiser les étudiants. Guère plus glorieux. Ces deux-là, isolés, frustrés (car entourés de frustes), différents, will kerr for each other, par la force des choses. Minnelli nous montre deux individus à l’écoute l’un de l’autre, elle, experte en son jardin, prenant soin de cette jeune pouce comme une mère aimante, lui, sans guère de repères affectifs, cultivant dans son jardin secret des sentiments pour cette fleur qui se fane en son intérieur. Ils se retrouvent loin des tensions diverses (elle subit la jalousie de son mari comme il subit les vexations de ses pairs – à l’exception de son comparse de chambrée qui le prend sous son aile : la sublime séquence où ce dernier tente d’apprendre à John à marcher : d’une belle légèreté comique) pour partager un thé, une sympathie réciproque (dans tous les sens du terme : il partage aussi bien leur douleur que leurs goûts – littéraires notamment) et plus si affinités. Le final, quant à lui, plein de tact et d’empathie – même envers la personne la plus antipathique de l’histoire – est tout aussi intelligemment mis en scène – les nuances sur les couleurs étant une nouvelle fois à tomber à genoux. Les goûts et les couleurs ne se discutent pas, diront les plus sceptiques, mais toute personne insensible à cette œuvre si fine (dans la fond) et « haute-en-couleurs » (dans la forme) est soit daltonienne, soit un lanceur de nains. Minnellissime.

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Commentaires
P
Vu hier un bidule étrange . "Heartbeat" de Sam Wood avec Jean-Pierre Aumont, Ginger Rogers, Basil Rathbone... Produit par Robert et Raymond Hakim ! Et quelques autres Français au générique comme Paul Misraki. <br /> <br /> Amazin' , non ? <br /> <br /> <br /> <br /> Si vous avez le loisir de jeter un œil sur les cartons du générique, ça vaut son pesant de pommes.
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M
Une "critique" tout autant en finesse et en délicatesse que ce film : merci pour ce texte magnifique !
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C
Profonde critique de certaines valeurs de normes, infiniment sensible, Deborah Kerr : tout est sublime.
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S
Mouais...? C'est pas ce que tu disais à la Noël dernière !<br /> <br /> Mais si t'as changé d'avis, tout à ton honneur, la Miche.
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T
Mé... mé... je l'adore, çui-là ..!<br /> <br /> Même si c'est vrai que je me fais chier comme un vieux lérot devant certains autres Minnelli.
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