Fog over Frisco (1934) de William Dieterle

On est toujours preneur d'un ptit polar des thirsties signé Dieterle faisant la part belle aux rues clermontoises de San Francisco et aux héroïnes troubles (C'est Bette Davis qui s'y colle, elle a à peine 14 ans et la gourgandine aux grands yeux de poupée est déjà super calculatrice). L'histoire est plus complexe qu'un Rubik's cube mais on s'amuse des nombreuses trahisons, coups de théâtre (une mort surprenante et glauque) et autres courses poursuites effrénées. Bette Davis est une charmeuse qui mène les hommes (à part son père, sérieux comme la mort) par le bout du nez et qui jongle avec les gros sous avec un plaisir non feint. Elle se rit de ces mâles qu'elle manipule comme un yoyo et s'excite de cette thune facile qu'elle parvient à détourner. Elle est simplement frivole et légère et pense être à l'abri des coups bas. Et si la bougresse, flirtant avec la mafia mais se pensant intouchable, se mettait le coude dans l'œil ? Heureusement, Val, sa "grande soeur" (la bien jolie Margaret Lindsay) veille sur elle, la protégeant aussi bien des remarques caustiques de leur père ou des journaleux fouille-merde. Sera-t-elle à la hauteur par rapport à la pègre  ?

Bette Davis est comme un poisson dans l'eau à distribuer des sourires à son fiancé et à embrasser de façon dévouée son amant. Elle est sur la corde raide en se jouant de la pègre comme s'il s'agissait d'une simple partie de Cluedo ; elle n'est toutefois pas à l'abri de se retrouver assommer par un chandelier dans la chambre jaune par le colonel Moutarde. Le rythme est assez virevoltant et le film s'emballe totalement lors d'une course-poursuite dans les rues de Frisco : la belle Val, trop innocente, "a rendez-vous avec la mort" sur un quai délicieusement embrumé - à ses trousses un journaliste dévoué et un troupeau de policiers qui cherchent à sauver la belle avant qu'il ne soit trop tard. Nos deux jeunes soeurs un peu olé-olé ne risquent-elles pas de tomber le nez sur le bitume ? Suspense… Malheureusement, le dernier tiers de ce film d'à peine 70 minutes, enquille les micro-séquences explicatives et l'on perd de vue le charme de la première partie : l'enquête est certes rondement menée mais l'on se fout finalement totalement du dénouement ; on aurait préféré que le Dieterle insiste sur les baisers délicieusement sensuels et empoisonnés de la Bette ou sur la douce complicité qu'elle entretient avec sa soeur, véritable sainte-vierge par rapport à la chafouine Davis. Une belle petite mise en bouche des charmes des « belles » (rues ou grues) de Frisco qui laisse un brin sur sa faim.